Meny Mazouz : l’homme dont dépend l’avenir de Sharon

Procureur général depuis février, il lui revient de décider d’inculper ou non le Premier ministre dans l’affaire de corruption dite de l’île grecque.

Publié le 1 juin 2004 Lecture : 3 minutes.

L’équipe constituée par le conseiller juridique du gouvernement israélien, Menachem Mazouz, autour de l’affaire de corruption dite de « l’île grecque » – dans laquelle le Premier ministre israélien et son fils sont impliqués -, serait-elle sur le point de conclure qu’il n’y a pas de preuves suffisantes confirmant qu’Ariel Sharon avait eu vent de pots-de-vin versés par l’entrepreneur David Appel à son fils Guilad et que, partant, l’un et l’autre ne pourraient être inculpés ?
Cette information, publiée le 27 avril par la seconde chaîne de télévision israélienne, n’a pas été confirmée par le ministère israélien de la Justice. En fait, la décision d’inculper ou non le chef du Likoud et son fils revient à « Meny » Mazouz, qui a promis de se prononcer le 15 juin et dont dépend, par conséquent, l’avenir de l’actuel gouvernement israélien.
Né en 1955 à Djerba, en Tunisie, dans une famille juive pratiquante – son père était rabbin et juge religieux -, et nombreuse – il a neuf frères et soeurs -, Meny Mazouz est lui-même un fervent religieux. Sa nomination, au début de février dernier, au poste très convoité de procureur général de l’État d’Israël – le onzième depuis la création de la fonction -, a été accueillie avec une immense joie par les Tunes, ces juifs originaires de Tunisie, qui n’ont pas été peu fiers de l’accession de l’un des leurs à l’un des plus hauts postes de l’élite d’Israël.
Meny Mazouz est très apprécié dans les milieux juridiques israéliens pour son excellente connaissance du droit et ses qualités humaines. Le fait qu’il soit issu d’une partie de la population peu représentée dans les cercles du pouvoir ajoute à son mérite.
Les Mazouz immigrent en Israël au début des années 1960. Ils s’installent à Netivot, une ville nouvelle construite dans le désert du Néguev, où ils ouvrent un magasin d’art et antiquités, Judaica. Élève doué, Meny poursuit ses études secondaires dans un internat à Jérusalem. Après son service militaire passé dans une unité de blindés de Tsahal, il hésite entre des études de médecine, de physique et de droit à l’Université hébraïque de Jérusalem. Il opte, finalement, pour le droit administratif et civil.
À sa sortie de l’université, Meny travaille pendant plusieurs années au bureau du procureur de l’État, traitant des plaintes portées devant la Cour suprême. Entre 1991 et 1995, il est chargé de coordonner les aspects légaux des négociations entre Israël, la Jordanie et les Palestiniens. En 1995, enfin, il est nommé procureur général adjoint, poste qu’il occupera jusqu’à janvier dernier.
Le procureur général est à la fois le premier responsable de la justice du pays et le conseiller juridique du gouvernement. Son pouvoir est énorme : il est chargé de faire respecter la loi par les institutions gouvernementales, de protéger les droits individuels, de traduire les criminels en justice et de mettre en application la loi dans chaque secteur de la vie civile et de la société.
Il va sans dire que sa nomination a fait l’objet de longues discussions, d’autant que sa première tâche importante consiste à décider s’il faut ou non inculper Sharon dans l’affaire de l’île grecque. La candidature de Mazouz a été présentée par le ministre de la Justice Tommy Lapid (chef du parti laïc Shinoui), qui l’a préféré à trois autres candidats. « Je suis convaincu, a dit celui-ci, qu’il est le meilleur choix, tant pour sa connaissance profonde du droit que pour sa personnalité. Sa franchise lui vaut le respect de tous. » La candidature de Mazouz a été acceptée par les vingt membres du gouvernement. L’opposition elle-même n’a pas émis de réserve. Commentaire, satisfait, de Lapid : « Un homme acceptable par tout le spectre politique a été nommé à un poste critique. Cela lui donnera plus d’autorité dans ses positions sur des questions essentielles. »
« Nous vivons à une époque de violence et de détournement de la loi, où le crime organisé essaie d’infiltrer l’autorité publique, où l’on raille les autorités juridiques et l’on tente de délégitimer le pouvoir judiciaire », a déclaré Mazouz au lendemain de sa nomination. Il a ajouté que l’une de ses priorités serait de « repositionner le bureau du procureur général par rapport aux diverses autres branches d’autorité et de réorganiser son mode de fonctionnement ». La manière dont il gérera les suites de l’affaire de l’île grecque en dira long sur sa capacité à conformer ses actes à ses paroles.

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