Justice transitionnelle en Tunisie : nombre record d’affaires envoyées en jugement au mois de mai

L’Instance Vérité et Dignité (IVD) a envoyé un nombre record d’affaires en jugement en mai, à quelques jours de la fin annoncée mais controversée de son mandat.

Audience publique de l’Instance vérité et dignité à Tunis, le 14 janvier 2017. © Capture d’écran/Instance Vérité Dignité/YouTube

Audience publique de l’Instance vérité et dignité à Tunis, le 14 janvier 2017. © Capture d’écran/Instance Vérité Dignité/YouTube

Publié le 24 mai 2018 Lecture : 2 minutes.

Chargée d’enquêter sur les violations des droits de l’Homme en Tunisie au cours des dernières décennies, l’IVD a le pouvoir de renvoyer devant des tribunaux spécialisés les responsables présumés de viols, meurtres, tortures ou faits de corruption.

En mai, elle a renvoyé au moins 25 dossiers concernant des « violations grave » des droits humains devant ces cours sur un total de 32 transmis depuis mars 2018, a indiqué à l’AFP Hayet Ouertani, membre de l’IVD.

Une accélération qui intervient au moment même où le Parlement a décidé de mettre fin au mandat de l’Instance le 31 mai. Cette décision a suscité l’indignation des ONG de défense des droits de l’homme, tunisiennes et internationales, ainsi que de l’IVD elle-même. Cette dernière souhaitait en effet prolonger ses enquêtes jusqu’en décembre 2018.

Courrier du Premier ministre

Mais cette semaine, le Premier ministre tunisien Youssef Chahed, a adressé un courrier à Sihem Bensedrine, présidente de l’IVD pour lui rappeler la décision du Parlement de mettre fin au travail de l’Instance le 31 mai, a indiqué une source gouvernementale à l’AFP.

Le lendemain, cette instance a déposé au tribunal spécialisé de Nabeul (nord) un dossier concernant la mort sous la torture d’un opposant, a ajouté Mme Ouertani sans donner de précisions.

Le 18 mai, l’IVD a également demandé à la justice spécialisée de Kasserine (centre) de juger 24 dossiers relatifs aux « martyrs et blessés » de cette région lors de la Révolution de 2011.

Un « pas significatif » selon HRW

« Sept ans après ces tueries, la réouverture de ces dossiers donne une nouvelle opportunité aux victimes et aux survivants de voir la justice rendue pour leurs souffrances », avait estimé l’ONG de défense des droits de l’Homme Human Rights Watch dans un communiqué évoquant un « pas significatif ».

Par ailleurs, le 29 mai, la cour spécialisée à Gabès (sud) ouvrira le premier procès découlant d’un dossier instruit par l’IVD. Il concerne Kamel Matmati, un islamiste victime de disparition forcée à Gabès en octobre 1991, sous la dictature de Zine el Abidine Ben Ali.

Selon l’IVD, d’anciens hauts responsables de l’État et d’anciens ministres du dictateur déchu sont poursuivis pour cette disparition.

Depuis le début de ses activités, cette instance a reçu plus de 62 000 dossiers de violations présumées des droits de l’Homme, et entendu environ 50 000 personnes.

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