L’œil de Glez : l’Union africaine mâle engagée ?

Un quotidien sud africain a révélé des témoignages de femmes dénonçant le sexisme qui sévirait au sein de l’Union africaine, en particulier au cœur de la Commission Paix et Sécurité. Épiphénomène ou tendance lourde ?

 © Damien Glez

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Publié le 25 mai 2018 Lecture : 2 minutes.

Les cordonniers seraient-ils vraiment les plus mal chaussés ? En matière de valorisation des compétences féminines, l’Union africaine ne manque jamais de mots dans ses discours, ni de perdiem dans ses séminaires. La décennie 2010 – 2020 a été consacrée, par l’UA, à l’égalité des genres et Nkosazana Dlamini-Zuma a dirigé la Commission de l’Union pendant plusieurs années.

Il y a moins d’un mois, l’institution panafricaine offrait des bourses d’études pour les femmes de moins de 40 ans. Il y a deux semaines, c’est le Comité technique spécialisé sur l’égalité homme-femme et l’autonomisation des femmes qui tenait sa troisième réunion à Addis Abeba. Sur la photo de fin de réunion : une cinquantaine de personnes ; trois de sexe masculin…

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Où sont les femmes ?

C’est pourtant un autre cliché photographique que certains internautes relayaient, il y a quelques semaines, sur leurs comptes Twitter : la photo que venait de poster l’Union africaine à l’occasion de la réunion « Creating One African Market » du « African Continental Free Trade Area ». On y voit une quarantaine de responsables de premier plan ; aucun de sexe féminin.

Nous sommes totalement consternées par l’enracinement de l’apartheid professionnel contre les employées de la commission

L’incompréhension de ces twittos fait écho a de récents mémorandums envoyés à des responsables de l’organisation comme le président de la Commission de l’UA, Moussa Faki, ou le dirigeant de la Commission Paix et Sécurité, Smaïl Chergui. Ce sont plusieurs dizaines de femmes liées à l’Union africaine qui y dénoncent un « apartheid professionnel » au sein de l’organisation.

« Nous, employées de la Commission de l’UA, sommes totalement consternées par l’enracinement de l’apartheid professionnel contre les employées de la commission, tel que manifesté par le département de la Paix et de la Sécurité », écrivent les signataires du courrier révélé par le quotidien sud-africain Mail & Guardian.

Les signataires de ces courriers sont-elles suffisamment représentatives pour que l’on conclue à une discrimination, par le genre, dans certains démembrements de l’organe continental, voire à une « négligence pour les promotions » des femmes ou à des limogeages « sans explication », selon des notes obtenues par le Mail & Guardian ? Suffisamment, en tout cas, pour susciter quelques réactions.

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Si Smaïl Chergui a balayé d’un revers de la main toutes les accusations formulées à son encontre, de même que Moussa Faki, par le biais d’Ebba Kalondo, sa porte parole, le vice-président de la Commission de l’UA, Kwesi Quartey, a promis d’enquêter.

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Nul doute que le poing revendicatif de certaines femmes de l’institution est à observer dans son contexte. 2018, c’est l’année de la libération de la parole de la femme, sur le plan planétaire, et l’opinion est donc bienveillante à l’égard des dénonciations de brimades de ce genre.

Ensuite, la présidence de l’UA est actuellement assurée par le Rwanda, chantre de la parité. Depuis les élections législatives de septembre 2016, 51 sièges de l’Assemblée rwandaise sur 80 sont occupés par des femmes. Alors pourquoi ne pas revendiquer fort les droits des fonctionnaires de sexe féminin, lorsque les oreilles de Paul Kagamé ne traînent pas loin du siège de l’Union africaine ?

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