Libéralisation en point de mire

La situation financière de la Compagnie malienne de développement des textiles s’est redressée. De quoi relancer le processus de privatisation.

Publié le 1 juin 2004 Lecture : 3 minutes.

C’est une bonne année pour les planteurs de coton. Avec une production record de plus de 612 000 tonnes, le Mali est devenu, en 2004, le premier producteur africain d’or blanc. La Compagnie malienne de développement des textiles (CMDT), qui détient un quasi-monopole sur l’ensemble de la filière (approvisionnement en intrants, collecte, achat, égrenage, transport, commercialisation), s’attend à des bénéfices globaux évalués entre 15 milliards et 20 milliards de F CFA, un redressement inespéré après des années de crise financière. Environ 10 milliards de F CFA resteront dans les comptes de la CMDT (contre 700 millions en 2003), le reste étant reversé aux paysans sous forme de ristournes pour bons résultats de campagne.
Paradoxalement, cette production record exacerbe les difficultés que connaît la filière. Premier problème, l’insuffisance des capacités d’égrenage, qui sont d’environ 530 000 t. Selon Zan Dossaye Diarra, directeur de la production agricole à la CMDT, la période d’égrenage atteindra cette année plus de deux cents jours, contre cent cinquante jours habituellement. Elle ne pourra être terminée avant la fin du mois de juin, d’autant que tout le coton n’a pas encore été acheminé des champs vers les usines. Résultat, les pluies précoces, qui ont déjà arrosé les contrées du sud du pays, ont mouillé une partie de la fibre, ce qui altère sa qualité. Dans ce contexte, les prévisions de récolte pour la prochaine campagne – de l’ordre de 640 000 t – posent une nouvelle fois le problème de la sous-capacité d’égrenage. D’autant que le prix d’achat au producteur est passé à la mi-mai de 200 F CFA à 210 F CFA le kilo, ce qui devrait les encourager à planter encore davantage.
« Nous sommes actuellement dans une impasse », explique Zan Dossaye Diarra. Décidé en avril 2001 lors de la tenue des « états généraux » du coton, le désengagement de la CMDT de ses fonctions de transporteur, d’approvisionneur en intrants et en équipements a été insuffisamment préparé. Le calendrier exigeait que 30 % des activités de transport soient confiées au secteur privé en 2004. En mai, 15 % des opérations de transport étaient réalisées par les privés.
Par ailleurs, la CMDT n’assure plus l’entretien des pistes qui, par conséquent, sont en mauvais état, et cela a retardé l’évacuation de la fibre. La vétusté des usines d’égrenage pose également problème, d’autant que la CMDT, en voie de privatisation, n’investit pas dans le renouvellement du matériel. Le principe de l’éclatement de la compagnie en trois ou quatre sociétés régionales privées ayant le monopole d’achat sur leur zone est acquis. Selon le calendrier arrêté avec les bailleurs de fonds, ce processus sera achevé d’ici à la fin 2006. Jusqu’à présent, le mécanisme a patiné, le gouvernement malien ayant peur de voir la privatisation lui échapper. Le schéma élaboré avec les institutions de Bretton Woods, non sans difficultés, prévoit que la Société financière internationale (SFI), filiale de la Banque mondiale, pilote la libéralisation. À ce jour, les négociations avec le gouvernement (notamment sur les modalités de l’appel d’offres et le montant des honoraires de la SFI) se poursuivent. Si tout va bien, les appels d’offres seront lancés, au plus tôt, au premier trimestre 2005. Avec 40 % du capital de la CMDT (l’État possède les 60 % restants), la société française Dagris ne devrait pas soumissionner, mais elle a néanmoins manifesté son intérêt pour un des lots qu’elle pourrait alors obtenir de gré à gré tout en se conformant au cahier des charges imposé aux autres repreneurs.
On peut penser que le nouveau gouvernement malien et son premier ministre Ousmane Issoufi Maïga seront davantage déterminés à faire avancer le processus. Reste à convaincre l’opinion publique malienne du bien-fondé de la privatisation dans un pays où l’or blanc fait vivre plus de trois millions de personnes.

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