L’œil de Glez : France-Sénégal, mon indépendance contre un clafoutis
En déclarant que « les régiments des tirailleurs sénégalais, quand ils étaient dans les casernes, avaient droit à des desserts pendant que d’autres Africains n’en avaient pas », le président sénégalais Macky Sall a suscité moqueries et indignations sur les réseaux sociaux…
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Damien Glez
Dessinateur et éditorialiste franco-burkinabè.
Publié le 29 mai 2018 Lecture : 2 minutes.
Il y a des précisions culinaires qui remettent des siècles d’histoire en perspective. Si l’on en croit l’actuel chef de l’État sénégalais, la crêpe Suzette, le clafoutis aux cerises ou le Paris-Brest seraient de nature à compenser les forfaits d’une colonisation que le président français, lui-même, est tenté de considérer comme un « crime contre l’Humanité ». Samedi 26 mai, lors du symposium de lancement du Tome 1 des ouvrages qu’il va publier dans le cadre d’une collection appelée « Conviction républicaine », Macky Sall évoquait les « relations particulières » que son pays entretint, au fil des décennies, avec la France.
Gâteau gaulois
Parmi les éléments positifs obtenus au cours de la colonisation française, le président évoque « les élections », mais aussi le respect dont auraient joui ses ancêtres, notamment au sein du régiment des tirailleurs sénégalais, ce corps militaire constitué, en 1857, au cœur de l’Empire colonial français. C’est ainsi que la vie dans les casernes donnait accès, selon le président du Sénégal, à « des desserts pendant que d’autres Africains n’en avaient pas ».
Les tirailleurs « sénégalais sénégalais » auraient-ils eu des privilèges refusés à leurs collègues d’autres nationalités ? Pourquoi alors – on se le demande – revendiquer des pensions alignées sur celles des vétérans français, lorsqu’on a pu bénéficier d’un gâteau dont le chocolat, même issu d’un cacao africain, est authentiquement gaulois ?
Un internaute demande « pardon à tous les Africains et Noirs de tous horizons »
Les internautes n’en croient pas leurs oreilles. Depuis ce jour, sur Twitter, beaucoup s’indignent. Sidéré, le twittos Mugiwara No Ousseynou demande solennellement « pardon à tous les Africains et Noirs de tous horizons », pour les propos de son président de la République.
Plus argumentés, les propos d’un « Babacar » rappellent le massacre de Thiaroye, le 1er décembre 1944, pendant lequel furent tués, par des gendarmes français renforcés de troupes coloniales, au moins 35 tirailleurs sénégalais qui manifestaient pour le paiement de leurs indemnités et pécule. Sur un mode plus humoristique, le twittos Joseph Faye indique que le Sénégal « a un Président en mode GAB : Guichet automatique de bourdes »…
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