Pour la Cnuced, les migrations sont une chance pour l’Afrique
Contrairement à bien des idées reçues, les migrations favorisent la croissance, indique le dernier rapport de la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement.
Mamadou et sa femme Ramatoulaye ont longuement hésité. Ils avaient quitté le Sénégal pour le Burkina Faso pensant y trouver du travail, lui comme soudeur elle comme commerçante, pour élever leur quatre enfants. Déception. Ils décident que Mamadou partira seul à Abidjan, dont on dit que c’est la locomotive régionale. Déception encore. Il partira pour Johannesburg qu’il atteindra après un voyage coûteux, dangereux et long, et où il aura mille difficultés à créer son entreprise de soudage.
Cette histoire fictive est le fil conducteur du rapport de la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (Cnuced) sur « Les migrations au service de la transformation structurelle » de l’Afrique, publié le 31 mai. Elle concentre tous les vécus des migrants africains.
« Nous voulions combattre l’image dominante des bateaux d’infortune qui traversent la Méditerranée chargés de migrants », explique Milasoa Chérel-Robson, économiste à la Cnuced. Le rapport analyse donc les caractéristiques des migrants, les causes de leur départ, leur destination, les embûches rencontrées.
Des migrations essentiellement continentales
Premier constat : les migrations africaines sont principalement continentales. En 2017, 19 millions de migrants se sont déplacés en Afrique et 17 millions ont quitté le continent. 5,5 millions de personnes sont venues en Afrique.
Les cinq principales destinations africaines sont par ordre décroissant l’Afrique du Sud, la Côte d’Ivoire, le Nigeria, le Kenya et la Libye.
La moyenne d’âge des migrants est de 31 ans, et 47 % d’entre eux sont des femmes. « Toutes les enquêtes montrent que le départ est dû à l’espoir de trouver un travail mieux rémunéré », souligne Mme Chérel-Robson.
Contrairement à bien des idées reçues, les migrations favorisent la croissance. Les pays d’accueil profitent des compétences et de la production des immigrés : ceux-ci ont contribué au produit intérieur brut de la Côte d’Ivoire pour 19 % en 2008, du Rwanda pour 13 % en 2012, de l’Afrique du Sud pour 9 % en 2011. « Les pays d’origine africains ont reçu 38,4 milliards de dollars de leurs émigrés, entre 2005 et 2007, mais 64,9 milliards entre 2014 et 2016, déclare l’économiste. Ce qui veut dire que les enfants d’émigrés seront mieux éduqués et mieux soignés. »
Faciliter les visas
Autre avantage des migrations, elles développent l’intégration africaine qui tarde et fournissent les compétences qui manquent dans les pays. « L’industrie pétrolière nigériane a formé des ingénieurs nigérians de grande qualité qui pourraient remplacer les expatriés occidentaux dans les autres pays pétroliers », conclut Mme Chérel-Robson.
Les recommandations de la Cnuced s’adressent aux gouvernements africains. « Mettez en œuvre les cadres législatifs et réglementaires que l’Union africaine a préconisé en 2006. Harmonisez vos diplômes. Facilitez les visas de travail. Régularisez les immigrés sans-papiers. Faites en sorte que vos diasporas aient intérêt à participer au développement de leur pays. Surtout, signez en décembre 2018, au Maroc, le Pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières. »
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