Start-up de la semaine : en Ouganda, Mandulis Energy s’apprête à éclairer 1 500 fermes
Elisabeth et Peter Nyeko, deux Ougandais formés au Royaume-Uni, sont retournés dans leur pays pour y lancer leur start-up de biogaz issu des déchets agricoles du riz et du maïs, selon un principe d’économie circulaire : les clients de leurs produits énergétiques sont aussi leurs fournisseurs de matières premières.
Au salon VivaTech, qui se tenait à Paris du 24 au 26 mai dernier, Peter Nyeko, 37 ans, et sa sœur Elisabeth, 34 ans, tout sourire, avaient un agenda chargé. Leurs missions : communiquer avec l’équipe de Total, qui soutient leur start-up Mandulis Energy dans son développement, faire connaître leur entreprise et enfin recruter des stagiaires et des professionnels diplômés pour renforcer leur équipe, qui doit passer d’ici la fin de l’année de 12 à 24 personnes.
C’est que d’ici là, leur réseau de production de gaz à partir de la biomasse des déchets agricoles locaux sera lancé. Ce gaz, transformé en électricité, pour une puissance de 250 kW, alimentera 1 500 fermes dans un rayon de 5 km autour de Nwoya, dans le nord de l’Ouganda. En outre, les résidus non transformés en électricité deviennent des briquettes de biochar (pour « bio-charcoal »). « Non seulement nous permettons aux agriculteurs de transformer sur place leur production de maïs et de riz, ce qui leur assure un meilleur revenu, mais nous leur procurons aussi un accès à une énergie abordable. Notre projet résout ainsi plusieurs problèmes d’un seul coup », se réjouit Elisabeth Nyeko.
De la médecine à Oxford, à la gestion de projet à Nwoya
Avant la naissance de Mandulis, en 2012, la jeune femme s’était pourtant lancée dans une toute autre voie : elle préparait une thèse de médecine à l’université d’Oxford, au Royaume-Uni, où sa famille a trouvé refuge pendant la guerre civile ougandaise des années 1980.
Mais en 2006, c’est d’abord son frère, Peter, titulaire d’un diplôme d’ingénierie aéronautique de l’université de Bristol, qui a fait le choix de rentrer au pays. « J’ai d’abord travaillé dans l’entreprise familiale de transport, avant de me demander ce qui pouvait être fait pour améliorer les conditions de vie dans mon pays. J’en suis venu très vite au secteur énergétique car un projet d’énergie propre permet une économie circulaire : cela évite de détruire les forêts, et donc de freiner le tourisme, deuxième poumon du pays avec l’agriculture », explique ce dernier.
Emballée par le projet, sa sœur le rejoint donc. Aujourd’hui, le duo de codirecteurs de Mandulis se partage les tâches : à elle, la gestion des finances et la recherche de nouvelles opportunités d’affaires ; à lui, la marche quotidienne de l’entreprise.
Un projet de blockchain avec Total et Vinci Énergies
Si, explique Peter Nyeko, « même une entreprise sociale doit être génératrice de revenus afin de pouvoir survivre même sans subvention », les frère et sœur n’espèrent pas atteindre l’équilibre avant quatre ans. Ils devraient alors avoir lancé 16 installations de 500 kW chacune à travers tout l’Ouganda et atteint 20 000 habitations, soit plus de 100 000 personnes. « Nous pourrons alors transposer notre modèle au Rwanda, en Tanzanie, mais aussi dans des pays comme le Vietnam et le Cambodge, qui rencontrent les mêmes difficultés d’accès à l’énergie de leur population rurale et pauvre », estiment-ils.
En attendant d’engranger des bénéfices, le duo peut compter sur de nombreux soutiens : la Royal Norwegian Society for Development, qui leur a procuré leur première machine, la Cnuced, le Vatican à travers son concours de start-up environnementales Laudato Si’ Challenge, ou encore le gouvernement ougandais, qui leur a assuré une bourse et un soutien opérationnel. Le tout a permis à Mandulis Energy de récolter 2,5 millions de dollars (en dons, prêts et capital-investissement). La start-up a également été distinguée par le MIT via la sélection des 35 under 35.
Le 25 mai, à VivaTech, les Nyeko ont également décroché le Viva Technology Africa Tech Blockchain for Energy Prize, qui va leur permettre de travailler avec Total et Vinci Énergies sur un projet de blockchain dans la distribution énergétique. « Mais là aussi, se pose clairement la question de l’accès et du prix. Sans même parler d’internet, il est parfois compliqué d’avoir le téléphone ! Cela complique énormément notre existence de start-uper et notre développement », regrette Elisabeth Nieko.
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