Délit de sale gueule

Publié le 2 mai 2006 Lecture : 2 minutes.

Le crime est abominable. Le mobile dérisoire. Un lecteur MP3 vaut-il cinq coups de couteau ?
La mort de Joe Van Holsbeeck, un adolescent belge de 17 ans tué à l’arme blanche en plein jour dans la gare centrale de Bruxelles, est révoltante. Presque autant que le climat de suspicion latente qui a entouré l’affaire quelques jours, avant qu’on ne découvre la réelle identité des meurtriers. Une partie des citoyens du plat pays avait en effet hâtivement conclu que ces derniers étaient maghrébins, après avoir vu les images de mauvaise qualité des caméras de surveillance.
De la condamnation du crime à la stigmatisation de toute une communauté, il n’y a qu’un pas. Celui-ci a manqué être franchi par les racistes prêts à jeter en pâture toute une population en « récupérant » la mort de l’adolescent. L’enquête a vite révélé que les assassins étaient polonais. Des Polonais tziganes certes, comme on a cru bon de le préciser, mais des Polonais tout de même. Quelle déception cela a dû être pour les extrémistes qui se frottaient sans doute déjà les mains, espérant alimenter les tensions intercommunautaires qui rongent la Belgique ! Dans le pays des patates aussi, la tolérance s’effrite

On ne le répétera jamais assez : la hâte est mauvaise conseillère. Souvenez-vous du crédit accordé d’emblée au mensonge éhonté de Marie Leblanc, cette Parisienne mythomane faussement agressée en juillet 2004 dans le RER par des « jeunes beurs et blacks ». Son récit inventé avait déclenché une vague d’indignation dans le milieu politique et associatif français. Et jeté le discrédit sur les jeunes de banlieues déjà suffisamment vilipendés.
Plus que jamais en ces temps où l’étranger est devenu le bouc émissaire dans nombre de pays de la vieille Europe, il est nécessaire de faire preuve de prudence. Le bon sens devrait pousser n’importe qui, citoyen ou politique, à s’assurer de l’authenticité des informations avant de condamner celui que tout désigne. L’immigré a souvent, n’est-ce pas, le triste privilège de transformer par ses seules origines la présomption en certitude.
Dans cette affaire, finalement, les plus dignes ont été les proches de l’adolescent assassiné, eux qui, sans laisser la haine infiltrer leur peine, ont trouvé le courage d’appeler à éviter toute dérive raciste.
Mais cela suffira-t-il à éteindre les braises de la xénophobie toujours prêtes à s’embraser à la moindre occasion ? Il est vrai qu’il est plus facile d’être incendiaire que pompier

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