Douze mercenaires devant leurs juges
Des Corses, un ancien responsable du MPCI (ex-Forces nouvelles), des légionnaires reconvertis en barbouzes, des agents de renseignements plus ou moins véreux Qui a dit que la « Françafrique » avait disparu ? Le procès des auteurs présumés d’une tentative de coup d’État contre le président Laurent Gbagbo, en 2003, prouve à l’évidence le contraire. Les treize inculpés, dont dix physiquement présents, qui comparaissent depuis le 10 mars devant le tribunal correctionnel de Paris forment une belle brochette de « tontons flingueurs ». Avec le physique de l’emploi !
Rocker gominé aux lunettes teintées, chauves patibulaires ou brutes épaisses en treillis militaire, tous se présentent pourtant comme les victimes d’une machination. Officiellement recrutés par le légionnaire Jean-Michel Chapuis pour protéger une personnalité désireuse de lancer un projet de ferme animalière en Côte d’Ivoire, ils apprendront ultérieurement par la Direction de la surveillance du territoire (DST), qui a déjoué in extremis l’opération depuis Paris, que leur rôle consistait en réalité à tirer au lance-roquettes sur le convoi du chef de l’État ivoirien, puis d’installer au pouvoir l’ancien chef rebelle Ibrahim Coulibaly – acteur clé du procès mais jugé par contumace – à la faveur d’un soulèvement populaire. « Nous ne savions pas que c’était un coup d’État », jurent-ils d’une seule voix.
Pourtant, quatre d’entre eux, au moins, étaient au courant : Mamadou Diomandé, responsable des relations internationales du MPCI et intermédiaire d’« IB » ; Hassan Sakr, un homme d’affaires libano-ivoirien, absent lors du procès mais présenté comme le financier de l’opération ; ainsi que François et Paul Léonelli, qui auraient pris en charge la logistique en échange d’une promesse d’ouverture de plusieurs casinos en Côte d’Ivoire.
Les faits sont graves, mais les inculpés, qui ont purgé leur peine préventive après leur arrestation pour « terrorisme et complot », se montrent étonnamment décontractés, presque désinvoltes. À chaque levée d’audience, ils gagnent la cafétéria, où, devant un café, ils prennent manifestement du bon temps. Ces Pieds Nickelés ont-ils vraiment compris qu’ils encourent une peine de sept ans d’emprisonnement et 100 000 euros d’amende ? Ou sont-ils convaincus de bénéficier d’un non-lieu ?
Face aux questions insistantes du président Jean-Claude Kross, la stratégie de défense des mercenaires est simple : en dire le moins possible, feindre d’oublier les faits et les dates, se charger mutuellement par avocats interposés, accuser la France d’être derrière la manuvre et, surtout, dénoncer les méthodes « musclées » de la DST, et celles, « inqualifiables », des magistrats instructeurs, notamment le juge Jean-Louis Bruguière. Reste à savoir si elle sera efficace. Fin des débats le 2 avril.
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