Décollage réussi

Situé à la périphérie de la ville, l’Aéropole attire les grands groupes internationaux. Et leurs sous-traitants, séduits par une main-d’uvre à bas coût.

Publié le 31 mars 2008 Lecture : 3 minutes.

C’est une immense zone industrielle en friche, située à 30 km de Casablanca. Des centaines d’hectares de parcelles, beaucoup de bâtiments en construction et quelques sociétés déjà opérationnelles. Difficile d’imaginer que c’est sur ce terrain en chantier que l’on fabrique des pièces pour les systèmes de freinage des Airbus A320. C’est pourtant ici que Casablanca Précision a choisi de s’installer, il y a deux ans à peine. À l’extérieur, toujours pas la moindre pancarte pour indiquer qui occupe ce bâtiment flambant neuf. Mais à l’intérieur, les machines tournent déjà à plein régime.
Le bureau de Pierre Berthelot, le jeune directeur industriel, est étonnamment vide. Il a fallu lancer rapidement la production en parant au plus pressé. La décoration viendra plus tard Seules des piles de CV viennent donner une touche de couleur à la pièce. « J’en reçois en moyenne trois par jour, explique-t-il. On embauche régulièrement. Nous sommes vingt et un aujourd’hui, dans deux jours nous serons vingt-cinq Et sûrement une quarantaine avant la fin de l’année. »
À l’image de Casablanca Précision, les sociétés installées dans la périphérie de la capitale économique marocaine sont des PME françaises. Aux côtés de Safran, EADS et Sogerma, elles sont une cinquantaine à avoir ouvert une antenne ici. La plupart ont choisi de s’installer sur l’Aéropole, la zone dédiée à l’aéronautique derrière l’aéroport Mohammed-V. « Notre cas est un peu particulier, confie Pierre Berthelot. Nous voulions être propriétaires du terrain, alors nous avons choisi de nous installer un peu plus loin. » De toute façon, l’Aéropole est toute proche. À peine dix minutes en voiture
Filiale d’Aéro Lorraine, holding spécialisé dans la fabrication de pièces de précision pour l’aéronautique basé dans l’est de la France, Casablanca Précision est née de la réorganisation du secteur. « Les carnets de commandes sont pleins, précise Hamid Benbrahim el-Andaloussi, président du Groupement des industriels marocains de l’aéronautique et du spatial. Airbus et Boeing, eux, se recentrent sur leur corps de métier : la conception, la stratégie produit et l’assemblage des avions. Ils reportent la production des pièces sur leurs fournisseurs Ainsi que les pressions de coûts et de risques. » Et cela se répercute sur toute la chaîne de sous-traitance. « En 2005, Safran, notre principal client, nous a signalé la nécessité de développer une partie de la production dans une zone à bas coût, » se souvient Pierre Berthelot. Le choix du Maroc ne s’est pas imposé tout de suite. Les dirigeants d’Aéro Lorraine ont d’abord prospecté en Europe de l’Est. Mais la région n’est plus aussi attractive depuis l’entrée de ces pays dans l’Union européenne (UE) et l’augmentation des salaires qui en découle. Sans oublier la barrière de la langue
Le choix de Casablanca s’est alors fait naturellement. La ville possédait déjà un tissu d’entreprises conséquent dans l’aéronautique et offrait une main-d’uvre francophone à bas coût. L’installation n’a pourtant pas été aussi facile que prévu. Il a fallu importer tout le matériel de production. Si les droits de douane sont nuls avec la zone euro, ce n’est pas le cas avec le reste du monde. Or les machines importées par Casablanca Précision viennent du Japon, du Brésil ou de Corée. « Le niveau de français des employés est souvent insuffisant et je dois m’appuyer sur le personnel d’encadrement pour faire passer mes directives, rajoute Pierre Berthelot. Quant aux salaires, on met souvent en avant le smic marocain de l’ordre de 160 euros. Mais pour embaucher un bon opérateur, il faut compter près du double. » Le secteur connaît d’ailleurs une inflation des salaires. Si elle reste raisonnable dans les métiers de base, elle est plus conséquente dans les activités à forte valeur ajoutée. Un handicap pour Casa, qui cherche justement à sortir de la simple sous-traitance. L’essor de la fabrication de matériaux composites, de la mise en place de programmes complexes et d’études – des activités déjà présentes à Casablanca à petite échelle – dépendra des ressources humaines. La solution viendra peut-être d’un Institut de formation aux métiers de l’aéronautique, dont la création est prévue en 2009.

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