« Pas en notre nom ! »

Publié le 2 avril 2003 Lecture : 2 minutes.

Le président des États-Unis et James Bond sont contre la guerre en Irak. Même un célèbre nabab du pétrole vient d’élever la voix contre des affrontements qu’il juge inutiles et dangereux. Non, il ne s’agit pas de politique fiction. Mais plutôt de cinéma et de télévision. Martin Sheen, qui incarne le président américain dans la fameuse série The West Wing (« À la Maison Blanche ») sur NBC, ne cesse de clamer son rejet de la politique de son « homologue » George W. Bush. De passage à Panamá City, le célèbre 007 d’origine écossaise, Sean Connery, a ajouté son nom à la longue liste des acteurs opposés à la guerre. Et Larry Hagman, qui interprétait le cynique J.R. Ewing dans la série Dallas, ne manque pas une occasion d’égratigner du haut de son Stetson le « cow-boy » de Washington… Bref, plus d’un an après les attentats du 11 septembre, Hollywood a changé son fusil d’épaule. L’élan patriotique avait été fort après le traumatisme des attentats, et acteurs et réalisateurs s’étaient mis au pas pour exalter les valeurs de l’Amérique démocratique dans nombre de films.
Trop de propagande tue la propagande. Hollywood, de tradition démocrate, vient de retrouver son caractère frondeur. La cérémonie des Oscars, qui s’est déroulée le 23 mars, trois jours à peine après le déclenchement des hostilités, a été le point d’orgue d’une vaste campagne de contestation. Certains ont boudé les festivités, comme l’acteur Will Smith (Men in black, Ali…) ou le réalisateur finlandais Aki Kaurismäki (L’Homme sans passé). D’autres sont venus, habillés de noirs, arborant à la boutonnière une colombe blanche. Mais le noir leur va si bien : elles étaient ravissantes, les Cameron Diaz, Mira Sorvino, Julia Roberts, Nicole Kidman, Geena Davis, Angelica Huston… D’autres, enfin, ont parlé. Pedro Almodóvar, qui a reçu l’Oscar du scénario pour Parle avec elle, a remercié publiquement « tous ceux qui prennent la parole en faveur de la paix ». Plus percutant, Michael Moore, honoré pour son documentaire Bowling for Columbine – véritable pamphlet contre les armes -, s’est adressé directement à George Bush « qui nous a envoyés à la guerre pour des raisons fictives ». Et a terminé son discours sur un « Nous sommes contre la guerre, M. Bush. Honte à vous ! » copieusement hué et vite couvert par la musique.
Cette vague de protestations issue des milieux artistiques du monde entier n’est pas nouvelle. Depuis plus de six mois, la pétition « Not in our name », déclinée dans toutes les langues, recueille des milliers de signatures. En France, on peut citer pêle-mêle le metteur en scène Alain Corneau, le chanteur Jean Ferrat, l’écrivain Maurice Nadeau, l’historien Pierre Vidal-Naquet. Aux États-Unis, le cinéaste Robert Altman, l’écrivain Kurt Vonnegut, le musicien Brian Eno… Partout, des voix s’élèvent : le Prix Nobel de littérature Gabriel García Márquez, l’écrivain italien Umberto Eco, les chanteurs Bono, Craig David, George Michael, Sheryl Crow… La star sénégalaise de la chanson Youssou Ndour a même annulé une série de concerts aux États-Unis en guise de protestation. Internet sert de relais à tous les artistes (www.digitalultras.com, www.contrelaguerre.org, www.nion.us, etc.), et la revendication pacifique se décline en tracts, tee-shirts, autocollants et autres produits dérivés. Quant à l’acteur Bruce Willis, qui plusieurs fois sauva le monde au cinéma, il se verrait bien en soldat de George W. Bush. Mais on lui a déconseillé de s’engager.

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