Médicaments à prix d’or

Publié le 2 avril 2003 Lecture : 2 minutes.

Un médicament capable de sauver une vie humaine devrait valoir son pesant d’or. Le prix du Fuzeon, nouvel antirétroviral, correspond exactement à vingt-sept fois son poids en or. Selon le laboratoire suisse Roche, qui l’a mis sur le marché, une année de traitement en Europe coûterait 18 980 euros (20 000 dollars), soit environ 290 euros le gramme. De quoi faire réfléchir les organismes publics et privés des pays riches comme des pays pauvres. Car ce sont eux qui paieront l’addition pour les milliers de patients candidats au traitement.
Même si Fuzeon est le médicament antisida le plus onéreux, son prix n’est pas si exorbitant comparé à d’autres, notamment les produits issus des biotechnologies. Zavesca, un médicament contre la maladie de Gaucher – dysfonctionnement génétique rare et mortel -, sera bientôt en vente en Europe. Il a été développé par Oxford Glyco Sciences, une entreprise de biotechnologie britannique que se disputent actuellement Celltech et Cambridge Entibody Technology. Une année de traitement avec Zavesca reviendra, au départ, à environ 100 000 dollars.
Pourquoi les médicaments sont-ils si chers ? Les associations de consommateurs dénoncent la cupidité des groupes pharmaceutiques. Les industriels répondent que les prix sont élevés afin de couvrir le coût de la recherche et du développement, qui peut aller jusqu’à plusieurs centaines de millions de dollars selon le produit.
Lorsqu’il s’agit de médicaments issus du génie génétique, une grande partie du prix de vente couvre simplement le prix de revient. À la différence des médicaments classiques, ceux qui sont élaborés à partir de protéines ou d’autres molécules biologiques peuvent être extrêmement complexes à réaliser, car on a souvent besoin de matières premières onéreuses ou de cellules vivantes pour extraire un produit qu’il faut ensuite soumettre à un processus élaboré de purification. Genzyme, une entreprise américaine de biotechnologie, estime qu’elle dépense quelque 150 millions de dollars par an pour fabriquer le Cerezyme, qui soigne la maladie de Gaucher. Elle le revend ensuite environ 170 000 dollars par année de traitement.
Comme l’explique Frank Lichtenberg, économiste à l’université Columbia (États-Unis), le prix d’un médicament est déterminé avant tout par l’intérêt qu’il présente pour les acheteurs. Les nouveaux médicaments qui permettent aux gens de rester en vie, de continuer à travailler et de réduire les dépenses globales de santé, peuvent prétendre à une bonne part de marché. Des sociétés comme Genzyme investissent d’ailleurs beaucoup d’argent et d’énergie à convaincre les assureurs publics et privés des économies qu’ils peuvent réaliser en achetant des médicaments coûteux. Selon les calculs de Lichtenberg, près de la moitié de l’augmentation de l’espérance de vie dans cinquante-deux pays entre 1986 et 2000 est due aux nouveaux médicaments mis en vente pendant cette période. Bien que le prix élevé de ces produits sophistiqués puisse indigner beaucoup de gens, l’autre possibilité – aucun médicament – ne serait pas moins scandaleuse et serait sûrement beaucoup moins bonne pour la santé.

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