Sur le front des antirétroviraux

En première ligne dans la lutte contre la pandémie, les associations locales se mobilisent pour que les Africains aient accès aux meilleurs soins.

Publié le 31 janvier 2005 Lecture : 2 minutes.

Qui a importé les génériques au Burkina Faso ? Qui gère la plus grande « file active » burundaise – la « file active » étant le nombre de malades suivis ? Qui a introduit les antirétroviraux (ARV) au Mali ? Ni les gouvernements ni les cliniques privées. Toutes ces initiatives de lutte contre le sida ont été prises par des associations locales, ces « petites » structures dont le rôle moteur n’est pas perçu à sa juste valeur. Si certaines parviennent à prescrire des ARV (à 10 % des personnes sous traitement sur le continent), les autres oeuvrent toutes pour favoriser l’accès à ces thérapies, en assurant le dépistage, le soutien psychosocial ou le suivi des infections opportunistes.
De janvier à avril 2004, Sidaction, l’association française dont une partie des activités est le financement des organismes associatifs du Sud, a donc pris l’initiative de mener une enquête de grande ampleur, intitulée « Accès commun », pour illustrer la contribution des groupes communautaires. Une démarche soutenue par l’Onusida, qui a financé en partie le projet et en publiera les conclusions, conjointement avec l’Organisation mondiale de la santé (OMS), dans sa collection « Best Practice ». Certes, cette étude n’est pas exhaustive. Mais elle a quadrillé le continent et fournit des informations, pour la plupart ignorées jusqu’ici ou insuffisamment prises en compte.
Deux cent soixante-dix organismes de type associatif ont répondu à l’enquête. Parmi eux, 181 sont impliqués dans l’accès aux ARV, dont 50 ont été identifiés comme des centres de suivi médical communautaires. Ils estiment tous que, si on leur fournissait des ARV, ils tripleraient presque immédiatement leur capacité d’accueil et de suivi, tout en dispensant les services habituels. On y apprend également que, contrairement aux idées reçues, le personnel disponible est important. Au sein des associations participant à l’enquête, près de 1 100 médecins et assistants médicaux sont impliqués dans le suivi médical, avec à leurs côtés 11 000 infirmiers et aides-soignants. On y découvre même que certaines structures jouent encore des rôles de pionniers, notamment en mettant en place des programmes de soins destinés aux enfants. Certes, ces initiatives sont rares, l’accès aux formules pédiatriques des ARV étant encore limité. Mais le recensement mené par Sidaction est un précieux indicateur des capacités associatives et un révélateur du temps que l’on perd à ne pas les prendre en considération. L’échelle de l’accès aux ARV sur le continent africain est encore ridicule, compte tenu des besoins. Mais ce qui paraissait hier une utopie – soigner des malades du sida en Afrique avec des moyens aussi modernes – est devenu aujourd’hui possible et nécessaire.
L’expertise de ces associations est due à leur origine. Bien souvent, elles ont été créées par des séropositifs, pour pallier les lacunes des systèmes publics de santé. Avec des bouts de ficelle, elles ont dû organiser un semblant de prise en charge. Au début des années 1990, il s’agissait bien souvent d’un soutien psychologique et matériel pour repousser les limites d’un quotidien qui devenait difficilement supportable. Dès lors, elles bénéficient d’un savoir-faire de terrain transmissible aux autres associations, mais aussi aux pouvoirs publics. C’est un des objectifs de la mise en ligne en libre accès de la synthèse de l’enquête et des contacts des associations (http://www.sidaction.org/accescommun). Ces initiatives pourront également être des éléments essentiels de stratégies mondiales, comme celle de l’OMS, qui vise à mettre 3 millions de personnes sous antirétroviraux d’ici à la fin de 2005.

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