[Tribune] Solidarité face à la crise centrafricaine
La communauté internationale doit davantage se préoccuper des conséquences économiques, sociales et environnementales provoquées par la crise centrafricaine, afin de limiter son impact dans les régions tchadiennes.
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Théophile Yombombé Madjitoloum
Théophile Yombombé Madjitoloum est député du Rassemblement national des démocrates tchadiens (RNDT-Le réveil, majorité), élu en 2011 dans la circonscription des Monts-de-Lam (Logone oriental, Sud du Tchad), 3e vice-président de l’Assemblée nationale.
Publié le 20 juin 2018 Lecture : 3 minutes.
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Les crises centrafricaines qui se sont succédé ont conduit au déferlement de réfugiés au Tchad. Au fil des années, leur nombre a dépassé les 100 000, et, sans une amélioration de la situation, le flux ne va pas se tarir. Rien qu’au premier trimestre de cette année, 30 000 nouveaux Centrafricains se sont exilés au Tchad.
La frontière sud abrite déjà six camps et plus de vingt-trois villages de réfugiés. Établis, pour certains, depuis bientôt quinze ans, ils impactent sévèrement l’environnement et, au-delà, les conditions de vie des populations hôtes puisque leur présence influe sur les besoins en nourriture et en eau, mais aussi en infrastructures d’accueil, qui se chiffreraient aujourd’hui à environ 550 millions de dollars. Sans que cela ait provoqué, jusqu’à maintenant, la moindre réaction de solidarité de la part de la communauté internationale.
Un hiver difficile
Dans ces conditions, l’hivernage qui arrive s’annonce des plus précaires, les autochtones ayant déjà partagé leurs maigres ressources avec les réfugiés. Le Logone-Oriental, qui est, avec le Mandoul et le Moyen-Chari, la région qui accueille actuellement le plus grand nombre d’entre eux, sort d’une campagne agricole difficile, accusant un déficit de 452 000 tonnes de céréales au sortir de la récolte 2017-2018.
À aucun moment les réfugiés centrafricains n’ont eu la chance de figurer en bonne place dans l’agenda des bailleurs de fonds
Depuis 2003, le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (UNHCR) ne cesse de rappeler l’insuffisance de l’aide et l’urgence de la situation, alors que le risque de conflits grandit à mesure que s’amenuisent les ressources disponibles.
>>> A LIRE – Carte : l’Afrique, premier continent d’accueil des réfugiés
La période d’hivernage va encore compliquer l’accès à certains sites d’hébergement, notamment dans la région des Monts-de-Lam, et poser des difficultés supplémentaires à la prise en charge des réfugiés tout en accentuant les souffrances des populations locales.
Par indifférence, la communauté internationale a créé les conditions d’une nouvelle crise, alors que quelques ressources supplémentaires auraient suffi à aider les populations à reconstruire leur vie, à devenir plus résilientes face aux nombreuses difficultés qu’elles rencontrent.
La lassitude arguée par les donneurs, face à une crise qui n’en finit pas, pour tenter d’expliquer leur inertie ne tient pas. À aucun moment les réfugiés centrafricains n’ont eu la chance de figurer en bonne place dans l’agenda des bailleurs de fonds.
La communauté internationale doit faire plus
Le Tchad, qui accueille aujourd’hui des ressortissants soudanais, nigérians et, donc, centrafricains, traverse une période difficile à la suite du ralentissement de son économie. Présenté comme un îlot de stabilité au cœur d’une sous-région tourmentée, le pays de Toumaï ne pourra supporter seul plus longtemps le poids de telles charges additionnelles.
Il est temps pour la communauté internationale de se préoccuper bien plus qu’elle ne le fait des conséquences économiques, sociales et environnementales provoquées par la crise centrafricaine. Les solutions apportées jusqu’à maintenant par les organisations humanitaires ne peuvent accompagner durablement les réfugiés et limiter leur impact dans les régions tchadiennes où ils se sont établis.
La communauté internationale doit faire l’effort de sortir d’une grille de lecture trop classique des événements
Pour s’inscrire dans la durée, il faut aider l’économie locale à redémarrer et renforcer les structures de l’État dans les régions les plus touchées, en encourageant peut-être une dynamique communautaire pour certains échelons décentralisés du pouvoir. Il faut absolument éviter tout risque de voir se dégrader davantage une situation déjà très précaire dans le Logone-Oriental.
La communauté internationale doit faire l’effort de sortir d’une grille de lecture trop classique des événements et bousculer ses agendas pour aider ces populations à vivre dans la dignité. En attendant qu’elles puissent, un jour, rentrer chez elles.
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