Madagascar : la nomination du nouveau gouvernement déçoit les manifestants

Le nouveau gouvernement malgache de « consensus », censé diriger le pays jusqu’aux prochaines élections générales, est sévèrement critiqué par les manifestants et l’opposition, qui réclament le départ des ministres du parti présidentiel.

Le président Hery Rajaonarimampianina, à Beijing, le 27 mars 2017. © Lintao Zhang/AP/SIPA

Le président Hery Rajaonarimampianina, à Beijing, le 27 mars 2017. © Lintao Zhang/AP/SIPA

Publié le 13 juin 2018 Lecture : 3 minutes.

Comme si les manifestants digéraient encore la nomination de la nouvelle équipe, le lundi 11 juin, le rassemblement quotidien a commencé plus tard qu’à l’accoutumée ce mardi. Quelques milliers de personnes ont finalement défilé, dépité.

« Je suis très contrariée de voir qu’il y a encore du HVM (le parti du président Hery Rajaonarimampianina) dans le gouvernement », regrette Hanta Razanadranaivo, une Malgache de 60 ans. « On réclame du changement et on obtient un recyclage des anciens ministres », s’indigne-t-elle, vêtue d’un t-shirt frappé d’un portrait de l’ancien président Marc Ravalomanana (2002-2009).

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« Pas besoin de ministres redoublants », résume une grande banderole déployée par la foule.

Hery Rajaonarimampianina a présenté lundi le nouveau gouvernement de Christian Ntsay, le Premier ministre de « consensus », censé conduire le pays jusqu’aux élections générales prévues cette année, après un mois et demi de crise ouverte entre le régime et ses adversaires.

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Haute Cour constitutionnelle (HCC) avait enjoint le président de nommer un gouvernement d’union afin de calmer l’opposition. Si cette dernière a décroché une petite dizaine de ministères, le compte n’y est pas, selon pour les manifestants du 13-Mai.

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« Ce nouveau gouvernement ne résout rien »

« Ce nouveau gouvernement ne résout rien. Il ne respecte pas la décision de la Haute Cour. N’ayant pas de députés, le HVM ne devrait plus faire partie de ce gouvernement », explique Julien Naina, un soutien de Marc Ravalomanana.

« Il faut continuer les manifestations jusqu’au renversement d’Hery Rajaonarimampianina », poursuit-il, « je préfère voir les ministres issus du Tim et du Mapar (principaux partis d’opposition) quitter ce gouvernement ».

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Un membre de l’opposition salue ainsi depuis l’estrade dressée sur la place du 13-Mai la « victoire » acquise avec l’entrée de membres du Tim et du Mapar dans le gouvernement.

« Non, non, non », lui répond d’une seule voix la foule, déçue des nominations. « On peut apercevoir sur vos visages la déception et le mécontentement car on n’a pas eu ce qu’on voulait », concède la députée Marie-Thérèse Volahaingo (Mapar), en remerciant la foule de s’être une nouvelle fois déplacée.

« Hier, au sein du Tim, à 16 h 00, on a encore discuté si oui ou non on allait dans le gouvernement. On a dit non, puis on a reçu l’ordre : entrer d’abord et on verra après », se justifie la députée Hanitriniaina Razafimanantsoa, du parti de l’ancien président Andry Rajoelina (2009-2014).

« On n’acceptera pas ne serait-ce qu’un seul HVM dans ce gouvernement […] On a le ministre de la Défense, qui a l’habitude de tuer ses compatriotes et qui est reconduit », a dénoncé la parlementaire. Le général Béni Xavier Rasolofonirina est en effet accusé d’avoir ordonné à ses troupes de tirer sur la manifestation qui a ouvert la crise fin avril, provoquant la mort de deux manifestants.

La presse d’opposition à l’unisson des manifestants

« On ne fait pas du neuf avec du vieux », a prévenu le journal Free News. Considéré comme plus neutre, L’Express de Madagascar a fait le même constat : « Gros lot au HVM, les miettes aux Mapar-Tim ».

La date des élections générales n’a pas encore été fixée, mais la HCC a exigé qu’elles se tiennent avant la fin de la saison sèche, soit d’ici fin septembre, et non plus à la fin 2018. La question est désormais de savoir si le gouvernement d’union nationale parviendra à maintenir le calme jusque-là.

« Le gouvernement a accouché d’un monstre à sept têtes. Il faut l’enterrer sans condition », a déjà tranché mardi Honoré Tsabotokay, un député indépendant. « Le sang versé ici n’est pas le sang des chiens », a-t-il lancé devant la foule. Avant de lui donner encore une fois rendez-vous mercredi 13 juin sur la même place du 13-Mai.

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