Privilégier les têtes bien faites

Après avoir accru la capacité d’accueil du supérieur, priorité à la qualité des enseignements.

Publié le 30 octobre 2006 Lecture : 3 minutes.

Dans moins de trente mois, la ville de Batna, capitale des Aurès, région d’Algérie connue pour avoir payé un lourd tribut pendant la guerre de libération, bénéficiera d’un nouveau pôle universitaire. Pouvant accueillir 22 000 étudiants, ce campus comptera une faculté des sciences humaines, une autre pour les sciences de la vie ainsi qu’un institut des sciences et technologies avancées. Six résidences universitaires seront également édifiées pour accueillir les étudiants. Ce nouveau projet illustre bien les ambitions affichées par les autorités pour faire de l’université algérienne un lieu de savoir et de formation. Alors qu’il inaugurait à Batna la rentrée universitaire 2006, le président Bouteflika a fixé les objectifs pour l’avenir : garantir un enseignement supérieur de qualité, élever le niveau des compétences des diplômés, améliorer le rendement général du système et adopter les formations proposées aux besoins du développement économique et social. Va-t-on enfin en finir, une bonne fois pour toutes, avec la vieille rengaine selon laquelle l’université algérienne ne formerait que des diplômés-chômeurs ?
Il est vrai que, une fois leur formation achevée, nombre de diplômés peinent à trouver un emploi et que le nombre de cerveaux algériens ayant fui le pays pendant la dernière décennie est tout simplement effarant (40 000, selon le Forum des chefs d’entreprise). Toutefois, beaucoup de choses ont changé depuis l’élection d’Abdelaziz Bouteflika en avril 1999. Le pays dispose aujourd’hui de 60 établissements universitaires, qu’il s’agisse d’universités, de facultés nationales ou d’écoles supérieures, réparties sur 41 wilayas (« départements »). Quelque 930 000 étudiants, toutes filières confondues, auront à fréquenter les amphis durant l’année 2006-2007, alors qu’en 1998 on ne recensait que 340 000 places. Les chiffres devront progressivement augmenter d’année en année pour atteindre le nombre de 1,4 million d’étudiants. Le taux d’inscrits en troisième cycle a bondi de 129 % entre 1998 et 2007. En 1999, 44 530 étudiants ont quitté l’université avec un diplôme en poche, alors qu’en 2005 ils étaient 110 000 à obtenir le précieux document. Pour encourager les élites, le gouvernement met, chaque année, à la disposition des étudiants sortis majors de leur promotion une centaine de bourses pour étudier à l’étranger.
À la suite du départ de milliers d’enseignants, professeurs et chercheurs, l’université a dû faire face à une absence cruelle d’encadrement. Le terrorisme, la bureaucratie, la misère sociale et le manque de reconnaissance ont provoqué une véritable saignée parmi les élites. Toutefois, depuis quelques années, la tendance s’est renversée puisque les candidats à l’exil sont de moins en moins nombreux. En 1998, le nombre d’enseignants exerçant dans le supérieur était de 16 260 personnes. Aujourd’hui, ils sont plus de 27 300 à dispenser les cours dans les universités et dans les instituts supérieurs. Mais ces chiffres ne doivent pas cacher la réalité du terrain. En dépit des multiples engagements pris par les autorités pour améliorer leur situation socioprofessionnelle, les enseignants du supérieur se plaignent de moyens insuffisants, de salaires peu conséquents ainsi que de conditions de travail difficiles. Certaines universités, notamment à Alger, Oran et Béjaïa, sont régulièrement paralysées par des mouvements de protestation.
Il n’empêche Le gouvernement a bel et bien décidé d’accorder la priorité au supérieur. « L’université a besoin de profondes réformes », martèle le président algérien. Le ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique, Rachid Haraouabia, a récemment annoncé que 4 milliards de dollars seront débloqués dans les quatre prochaines années pour l’acquisition des équipements. Les budgets accordés à ce ministère ne cessent d’augmenter chaque année. En 1997, le budget alloué à la recherche scientifique ne représentait que 0,18 % du PIB. Pour la période allant de 1999 à 2002, le gouvernement a doté ce département d’une enveloppe globale de 133 milliards de DA (1,46 milliard d’euros). Et, pour la seule année 2006, les autorités ont prévu un montant global de 100 milliards de DA (1,1 milliard d’euros), soit 1 % du PIB. « Nous avons gagné la bataille de la quantité. Reste à gagner celle de la qualité », affirme Abdelaziz Bouteflika. Et en ce domaine beaucoup reste à faire.

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