Guillaume Soro

Secrétaire général des Forces nouvelles, ministre d’État de la Reconstruction et de la Réinsertion de Côte d’Ivoire

Publié le 30 octobre 2006 Lecture : 3 minutes.

A 34 ans, Guillaume Soro a changé. Physiquement et, peut-être même, tout court. L’homme qui est passé début octobre à Jeune Afrique qu’il a « toujours voulu découvrir » pour rendre « hommage à toutes ces femmes et tous ces hommes qui à travers des générations ont rendu possible l’éclosion de la vérité et de l’information » n’est plus l’étudiant à la silhouette sahélienne qui haranguait ses camarades au milieu des années 1990. Ni même celui présenté, à la mi-octobre 2002, un mois presque jour pour jour après l’éclatement de l’insurrection armée, comme le secrétaire général du Mouvement patriotique de Côte d’Ivoire (MPCI), le nom de baptême de la rébellion. Le « Che » des AG amphigouriques de la Fédération estudiantine et scolaire de Côte d’Ivoire (Fesci), hier porte-drapeau d’une jeunesse « conjoncturée », celle du chômage, de la crise, de l’ajustement structurel et des budgets compressés, aujourd’hui chef de file d’un mouvement politico-militaire, a pris du poids, beaucoup de poids ! Au propre comme au figuré.
La fréquentation des couloirs et des salons lambrissés du pouvoir ainsi que celle des chefs d’État l’ont poli et mis à l’aise dans ses nouvelles rondeurs. Soro est toujours entre deux aéroports. Avant-hier à New York pour discuter, en marge de l’Assemblée générale de l’ONU, du dossier de la Côte d’Ivoire, hier à Bucarest pour plaider la cause de ses camarades des Forces nouvelles (FN). Aujourd’hui à Paris pour les mêmes raisons, il en a profité pour passer voir Béchir Ben Yahmed et lui remettre les « recommandations [des FN] pour une nouvelle transition en Côte d’Ivoire ». Un document de dix pages qui devait nourrir son argumentaire auprès des chefs d’État de la Cedeao réunis le 6 octobre à Abuja pour se pencher sur le sort de son pays.

Soro n’y était pas invité. Mais il sait avoir désormais accès aux « en haut de en haut », comme on dit chez lui pour parler de ceux qui dirigent les affaires de leur pays. Il siège au gouvernement depuis mars 2003 comme ministre d’État, d’abord chargé de la Communication, puis de la Reconstruction et de la Réinsertion, avec rang de numéro deux derrière le Premier ministre Charles Konan Banny. Depuis, la fonction a sinon contrarié, du moins modifié la nature de l’homme. Soro, qui a survécu dans la clandestinité à la confusion des jours qui ont suivi le 19 septembre 2002 à Abidjan, avant de rallier Bouaké par des chemins de traverse, n’est plus un spécialiste de l’agit-prop. Il a franchi une étape de son parcours et raffermi ses talents de leader : il est devenu moins militant syndicaliste, plus politique.

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Il avait tâté cette voie quand, en décembre 1999, au lendemain du putsch du général Robert Gueï, il avait décidé de rentrer au pays et de lancer au cours d’un meeting l’idée d’une opération « mains propres » contre les anciens dignitaires du régime déchu. Un an plus tard, il s’était jeté dans la bagarre des législatives aux côtés d’Henriette Diabaté, qui défendait à Port-Bouët les couleurs du Rassemblement des républicains (RDR) d’Alassane Ouattara avant de boycotter le scrutin à cause du rejet de la candidature de ce dernier. À chaque fois, son passé l’a rattrapé. Et même poursuivi dans le premier gouvernement de réconciliation nationale de Seydou Elimane Diarra, comme dans les différentes rencontres régionales et internationales qui ont jalonné l’interminable transition ivoirienne.
Il n’a pas totalement abandonné cette posture rigide, de surenchères, qui plaçait toujours la barre haut, gênait souvent ses partenaires de l’opposition non armée et agaçait parfois certains chefs d’État pourtant très tôt sensibles à sa « cause », comme le Nigérian Olusegun Obasanjo ou le Sénégalais Abdoulaye Wade. Notamment quand, dans l’équipe de Diarra, il exigeait les portefeuilles de la Défense et de la Sécurité. Rien de tel aujourd’hui. De crainte d’en faire un peu trop et de s’aliéner tout le monde, Soro s’est décidé au compromis. Son discours s’en est trouvé quelque peu adouci. La longueur de la crise est passée par là, l’inusable capacité à rebondir du président Laurent Gbagbo, aussi.

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