John Githongo, « monsieur Propre » kényan

Publié le 30 août 2004 Lecture : 2 minutes.

«La corruption est la cause de bien des maux. Elle est initiée par le sommet et finit au sommet » : ainsi s’exprimait John Githongo en janvier 2003, après que le nouveau président kényan, Mwai Kibaki, l’eut nommé secrétaire permanent pour la bonne gouvernance et l’éthique. Un choix symbolique : l’homme devait incarner la volonté gouvernementale de mettre un terme au mal endémique plombant l’économie du pays…
Croisé de la lutte anticorruption, John Githongo incarne des années d’opposition au régime de Daniel arap Moi. Né à Londres en 1965, appartenant à l’ethnie kikuyue, majoritaire au Kenya, Githongo est issu d’un milieu aisé originaire d’Othaya (Centre). Diplômé en économie et en philosophie de l’Université du pays de Galles, à Swansea, il a bâti sa renommée à la force de la plume, fustigeant dans les colonnes de l’East African les exactions d’un pouvoir phagocyté par les caciques de la Kanu (Kenya African National Union). C’est lui qui, de surcroît, a fait de Transparency International l’une des ONG les plus prestigieuses du Kenya. « J’ai toujours été fasciné par les connexions entre corruption et politique », déclarait-il à la BBC au moment d’entrer au gouvernement, au début de l’année 2003. Nul doute qu’il se faisait déjà une petite idée des difficultés qui l’attendaient : « C’est déjà une petite révolution pour moi de porter une cravate. J’y ai résisté des années durant »…

Près de deux ans plus tard, son influence reste difficile à évaluer. Après des débuts prometteurs, le gouvernement de Kibaki s’est fait taper sur les doigts par les principaux bailleurs de fonds (voir J.A.I. n° 2273), inquiets de ne pas voir avancer les réformes. L’homme, pourtant, semble faire de son mieux. « Notre crédibilité dans la lutte contre la corruption sera évaluée à l’aune de nos résultats, notamment en ce qui concerne l’affaire de la firme Anglo Leasing & Finance Ltd. [Payée 4,7 millions d’euros pour faire construire des laboratoires médicaux et mettre en place un système de passeports sécurisés, cette entreprise est soupçonnée de surfacturation , NDLR] Mais l’allure à laquelle nous avançons n’est satisfaisante ni pour les Kényans, ni pour la communauté internationale. » Aveu d’impuissance ou contraintes de la Realpolitik ? « Le combat contre l’impunité ne doit pas être perçu comme une chasse aux sorcières », affirme désormais Githongo. Reste que certaines « sorcières » semblent déterminées à freiner les velléités du secrétaire permanent. Lors du remaniement ministériel de début juillet, son bureau a un temps été transféré d’Harambee House (bureau du président) à Sheria House (ministère de la Justice et des Affaires constitutionnelles). Une rétrogradation qui a suscité les hauts cris de la presse, des bailleurs de fonds et des Kényans – et contraint Mwai Kibaki à faire aussitôt marche arrière. De nouveau en prise avec State House, « monsieur Propre » a encore du pain sur la planche.

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