Ho Chi Minh proclame l’indépendance du Vietnam
Sur le pont du cuirassé américain Missouri, le représentant du gouvernement japonais signe l’acte de reddition de son pays. Une vingtaine de jours plus tôt, deux bombes atomiques se sont abattues sur l’archipel nippon, à Hiroshima et à Nagasaki.
Au même moment, sur la place Ba-Dinh, à Hanoi, le président Ho Chi Minh proclame l’indépendance de la République démocratique du Vietnam. La déclaration commence par un pied de nez à deux puissances qui, dans les années à venir, viendront s’enliser ici : « « Tous les hommes sont nés égaux. Le Créateur nous a donné des droits inviolables : le droit de vivre, le droit d’être libre et le droit de réaliser notre bonheur. » Cette parole immortelle est tirée de la Déclaration d’indépendance des États-Unis d’Amérique en 1776. Prise dans un sens plus large, cette phrase signifie : tous les peuples sur la terre sont nés égaux, tous les peuples ont le droit de vivre, d’être libres. La Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de la Révolution française proclame également : « Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits. » Ce sont là des vérités indéniables. » Avec des accents lyriques de circonstance, le discours s’achève sur une proclamation solennelle : « Le Vietnam a le droit d’être libre et indépendant et, en fait, est devenu libre et indépendant. Tout le peuple du Vietnam est décidé à mobiliser toutes ses forces spirituelles et matérielles, à sacrifier sa vie et ses biens pour garder son droit à la liberté et l’indépendance. »
Une détermination sans faille : c’est ce qu’il a fallu pour en arriver là, c’est ce qu’il faudra encore pendant des années pour que l’espoir devienne réalité. Et cette détermination, un homme l’incarne : Ho Chi Minh, petit, sec et barbichu, devenu l’homme providentiel du Vietnam. Né le 19 mai 1890 à Kiem-Lien, Nguyen Tat Thanh a quitté Saigon en 1911 à bord du Latouche-Tréville et bourlingué jusqu’en 1917. Boy, balayeur, cuisinier, il finit par échouer à Paris où, sensibilisé aux thèses marxistes, il se fait un nouveau nom, Nguyen Ai Quoc, au sein du journal anticolonialiste Paria. À cette époque, il rédige une brochure, Procès de la colonisation française, « dont le gouvernement révolutionnaire de Hanoi reprendra presque mot pour mot les termes dans sa première proclamation, le 2 septembre 1945 », selon l’historien Jean Lacouture.
En 1924, c’est Moscou et la direction du Krestintern, l’Internationale paysanne. Puis la Chine, où il fonde l’Association de la jeunesse révolutionnaire du Vietnam (Than Nienh) et rassemble autour de lui les exilés vietnamiens opposés à la domination française. Il assied son autorité et jette les bases du Parti communiste indochinois – qui verra le jour le 3 février 1930. Trop nationaliste pour les communistes, condamné par contumace par les Français, arrêté à Hong Kong par les Britanniques et atteint de tuberculose, il meurt officiellement en prison. Mais on le retrouve à Moscou, puis en Chine, tandis que ses disciples Pham Van Dong, Vo Nguyen Giap et Tran Van Giau « travaillent les masses » en Indochine. En février 1941, il rassemble des militants à la frontière chinoise avec le Tonkin, puis rentre au pays par les chemins de montagne, installe ses troupes à Thai-Nguyen et prend le nom d’Ho Chi Minh, « puits de lumière »… Le Vietminh est créé en mai 1941. Les autorités françaises réagissent, mais elles sont écrasées par… le Japon, qui sauve paradoxalement la mise aux communistes vietnamiens : l’occupation japonaise n’est pas aussi puissante que l’administration coloniale. La capitulation du Japon, en août 1945, ouvre les portes du pouvoir à Ho Chi Minh. Le « vénérable », homme providentiel, contraint l’empereur Bao Dai à abdiquer et s’impose sans difficulté comme le leader de l’indépendance.
Pourtant, celle-ci ne sera acquise que bien après le 2 septembre 1945 : après l’échec de la tentative de reconquête coloniale française, après les accords de Genève de 1954, après la mort d’Ho Chi Minh en 1969, après le napalm et les bombes, après la prise de Saigon en 1975…
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