Malawi : les albinos, du martyre à la candidature
Dans certains pays africains, les albinos font l’objet d’une véritable chasse à l’homme. Pour changer la donne au Malawi, les victimes s’improvisent politiciens…
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Damien Glez
Dessinateur et éditorialiste franco-burkinabè.
Publié le 3 juillet 2018 Lecture : 2 minutes.
Double peine ? Triple peine ? Il ne fait pas bon être albinos en Afrique, alors que le risque de souffrir de cette anomalie génétique serait quatre fois plus élevé dans certaines zones du continent qu’en Europe. En premier lieu, le déficit de production de mélanine provoque une photophobie qui augmente la prévalence de cancer de la peau. Sur un continent « noir » particulièrement ensoleillé, à peine 2 % des personnes atteintes d’albinisme vivent au-delà de 40 ans.
Pays le plus dangereux
En deuxième lieu, ces citoyens au faciès identifiable sont largement victimes d’ostracisme dans des pays comme le Mozambique, le Burundi ou le Kenya. En troisième lieu, ces personnes surnommées « fantômes » en Tanzanie sont régulièrement victimes de crimes rituels censés apporter richesse et chance à leurs commanditaires. Cibles de croyances archaïques, leur sang, leurs membres ou leurs organes font l’objet d’un macabre trafic…
Depuis 2014, il y aurait eu un total de 148 cas de violences dirigées contre ces personnes, dont 22 meurtres
Si l’on en croit les chiffres de l’Organisation des Nations unies, le Malawi serait le pays le plus dangereux pour les personnes vivant avec l’albinisme. 10 000 albinos y résideraient et ce n’est qu’en 2016, après 65 attaques en un peu plus d’un an, que les autorités décidèrent d’encadrer les pratiques des sorciers et des guérisseurs. Selon l’Association des personnes albinos (Apam), il y aurait eu, depuis 2014, un total de 148 cas de violences dirigées contre ces personnes, dont 22 meurtres. Seuls 44 de ces cas auraient fait l’objet d’une enquête judiciaire.
Candidats aux élections législatives et municipales
Comment changer les croyances ? Peut-être en commençant par faire évoluer les mentalités, remplaçant progressivement l’ostracisme par l’intégration des albinos à tous les niveaux de la société. De ce point de vue, entrer en politique est un pari judicieux pour faire évoluer, à moyen terme, l’action publique à l’égard de l’albinisme et pour faire, à court terme, œuvre de témoignage.
Si l’on peut croire que l’albinos sacrifié garantit la fortune égoïste, pourquoi l’albinos élu ne porterait-il pas chance au pays tout entier ?
C’est pour défier la stigmatisation que six membres de l’Apam seront candidats aux élections législatives et municipales prévues l’année prochaine au Malawi. Une première où les personnes victimes de cette anomalie génétique ont toujours été tenues à l’écart des postes électifs. Si l’on peut croire que l’albinos sacrifié garantit la fortune égoïste, pourquoi l’albinos élu ne porterait-il pas chance au pays tout entier ? En 2010, une personne vivant avec l’albinisme, Salum Khalfani Bar’wani, était élu au parlement Tanzanien.
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