L’Afrique en questions

La Conférence des chefs d’État de l’Union africaine s’ouvre le 10 juillet à Maputo. L’ordre du jour est chargé et les discussions s’annoncent animées.

Publié le 30 juin 2003 Lecture : 4 minutes.

Penser que les enjeux du deuxième sommet ordinaire de l’Union africaine (UA) se limitent à l’élection des membres de la Commission serait quelque peu réducteur. Si ce scrutin est bien au coeur de la réunion de Maputo, l’ordre du jour de la Conférence des chefs d’État n’en comporte pas moins quinze points et deux thèmes spéciaux. Parmi les quinze questions qui seront débattues, certaines promettent de longues et harassantes séances nocturnes pour les chefs de délégation, notamment les points 10 – consacré aux conflits en Afrique – et 12 – portant sur l’étude des huit propositions formulées par des États membres.
Traditionnellement, le président intérimaire de la Commission, principal artisan de ce menu, présentera son rapport d’exercice lors de la cérémonie d’ouverture, prévue le 10 juillet. Après cette allocution de l’Ivoirien Amara Essy, le président en exercice de l’UA, Thabo Mbeki, devrait passer le témoin à son homologue mozambicain, Joaquim Chissano. Il sera alors temps d’aborder les deux premiers points de l’ordre du jour : l’élection du président de la Commission (Amara Essy pour un mandat de plein exercice ou le Malien Alpha Oumar Konaré) et celle du vice-président. Cette opération achevée, la séance sera levée pour permettre aux ministres des Affaires étrangères de se retirer dans une salle annexe où ils tiendront une réunion du conseil exécutif afin d’élire les huit commissaires, les membres de la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples, et ceux du Comité africain des experts sur les droits et le bien-être des enfants. Les travaux reprendront avec la lecture d’un rapport élaboré par le chef de la diplomatie mozambicaine, qui assure la présidence du Conseil exécutif, pour informer les chefs d’État des résultats de ces différentes élections.
Le premier chef d’État à intervenir à la tribune, lors des travaux proprement dits, sera Thabo Mbeki. Le président sud-africain a été chargé de présenter un rapport sur la politique commune africaine de défense et de sécurité. Bref rappel historique. Lors du premier sommet de l’UA, à Durban le 8 juillet 2002, le colonel Kadhafi avait proposé une dizaine d’amendements de l’Acte constitutif. Tous rejetés. Mais la délégation libyenne avait fortement insisté sur l’un d’entre eux : la dissolution des armées nationales au profit d’un seul corps africain. Cette question avait provoqué un long débat et des interventions contradictoires. L’Ougandais Yoweri Museveni avait, pour sa part, suggéré la transformation du contenu de la proposition de Kadhafi en une réflexion autour d’une politique commune en matière de défense. Thabo Mbeki en avait alors accepté l’idée et déclaré prendre en charge cette question jusqu’au sommet de Maputo. Depuis, des experts politiques et militaires des 53 pays membres se sont réunis à deux reprises en Afrique du Sud pour affiner le dossier. Mbeki devrait annoncer à l’occasion du sommet de Maputo la tenue d’une prochaine réunion des ministres de la Défense et de l’Intérieur (ou en charge de la Sécurité).
À l’issue de l’examen des deux thèmes spéciaux – « Mise en oeuvre du Nouveau Partenariat pour le développement de l’Afrique (Nepad) » et « Déclaration d’Abuja sur le VIH-sida, la tuberculose, le paludisme et autres maladies connexes » -, les participants devront se pencher sur deux projets et une convention. Le premier de ces projets porte sur un protocole concernant la Cour de justice africaine, le second doit introduire une mention des droits de la femme dans la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples. La convention, elle, traite de la prévention et de la lutte contre la corruption. Ensuite, les chefs de délégation auront à débattre de la situation des conflits en Afrique, du Liberia au Soudan, de la République centrafricaine à la région des Grands Lacs. Amara Essy reviendra alors à la tribune pour présenter les activités de la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples.
Le point numéro 12 de l’ordre du jour prévoit l’étude des diverses propositions formulées par les États membres. Celles-ci sont au nombre de huit. La première émane du Burkina Faso. Blaise Compaoré suggère l’organisation d’un sommet spécial sur l’emploi et la lutte contre la pauvreté en Afrique. Deux autres sont le fait du Sénégalais Abdoulaye Wade : création d’un Conseil sur le futur de l’Union, et développement du plan d’action du Nepad en matière d’environnement. La Tunisie souhaite pour sa part que l’Afrique se batte pour faire de 2004 l’année internationale pour l’éducation physique et le sport au service du développement et de la paix, et le Nigeria propose de créer un Conseil africain pour la santé durable. Enfin, pour ne pas faillir à sa réputation d’agitateur d’idées, Mouammar Kadhafi avance trois projets qui risquent, une nouvelle fois, de provoquer de longs débats. Le Guide appelle tout d’abord à la création de cinq bureaux régionaux de l’UA. L’aspect polémique de cette proposition tient à ce qu’elle désigne, avant même d’avoir été débattue, les capitales africaines devant abriter ces bureaux : Pretoria, Abuja, Tripoli, Libreville et Addis-Abeba. La deuxième idée porte l’empreinte de l’ex-monsieur Afrique de Kadhafi, Abdessalam Ali Triki : fixer la journée de l’UA non pas au 2 mars comme c’est aujourd’hui acquis, mais au 9 septembre, date anniversaire du sommet extraordinaire de Syrte (Lybie) considéré par la Jamahiriya comme marquant la véritable naissance de l’Union… Enfin, Kadhafi désire lancer une réflexion sur les relations entre l’UA et les autres continents.
Ces points examinés, les chefs d’État passeront en revue les décisions et recommandations de leurs ministres des Affaires étrangères lors de leurs différentes réunions : ordinaires – à N’Djamena (mars 2003) et Sun City (mai 2003) – ou extraordinaires – à Tripoli (décembre 2002) et Addis-Abeba (février 2003). Ils devront ensuite désigner la ville qui accueillera le troisième sommet de l’UA. Jusqu’à présent, le calendrier arrêté par le sommet d’Alger en 1999 a été respecté. Si l’on ne déroge pas à la règle, c’est à Khartoum, la capitale soudanaise, que les chefs d’État de l’Union africaine se retrouveront l’année prochaine.

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