Maroc : deux ans après leur interdiction, les sacs plastiques n’ont pas disparu
Si la loi « zéro mika » (zéro déchet), qui interdit l’utilisation et la production des sacs en plastique au Maroc a deux ans, force est de constater que son application reste encore limitée au circuit organisé, tandis que de nouveaux canaux d’approvisionnement se sont créés à destination des marchands ambulants et des souks.
Cela fait exactement deux ans que les Marocains n’ont plus le droit, théoriquement, d’utiliser les sacs en plastique, « Mika » comme on dit dans le royaume. La loi n° 77-15, entrée en vigueur quelques semaines seulement avant la tenue de la COP22 au Maroc, a été portée et défendue par Moulay Hafid Elalamy, ministre de l’Industrie, de l’Investissement, du Commerce et de l’Économie numérique, tout au long de son parcours législatif. C’est lui qui revient, en ce début du mois de juillet, pour dresser un bilan d’étape, quelques jours seulement après la publication d’une enquête mettant à mal les réalisations de ladite loi.
L’association Zéro Zbel (déchet), a en effet interrogé 235 personnes sur trois villes, en visitant 8 souks. Selon les résultats de ce sondage, 60 % des commerçants interrogés déclarent qu’une grande majorité de la clientèle exigent encore des sacs en plastique.
« Le prix, la difficulté à changer les habitudes et l’aspect peu pratique des alternatives aux sacs en plastique sont identifiés comme les trois principales limites à leur utilisation. De plus, la distribution gratuite de sacs plastiques est aussi un frein majeur au changement », conclut l’association. En outre, 82% des clients considèrent qu’il manque encore des alternatives adaptées à l’achat de certains produits, comme le poisson, la viande ou encore l’huile d’olive.
Une conclusion confirmée à demi-mot par le ministre de l’Industrie. « À chaque fois qu’on ferme une porte, une fenêtre s’ouvre. Les sacs en plastique sont toujours disponibles et nous avons remarqué l’apparition de nouveaux modes d’approvisionnement et de distribution que nous allons continuer à combattre », regrette Moulay Hafid Elalamy. Ces canaux nourrissent les marchands ambulants, les souks et même quelques épiceries dans les grandes villes.
5 millions de dirhams d’amendes cumulées
La chasse des commerçants ne respectant pas la nouvelle loi a pourtant commencé dès sa promulgation. 682 467 opérations de contrôle ont été effectuées sur les vingt-quatre derniers mois à travers tout le pays. 3 826 infractions ont été enregistrées et plus de 5 millions de dirhams (450 000 euros) d’amendes ont été prononcés. Le ministère explique en outre que les saisies des sacs en plastiques, sur les points de vente ou dans leurs ateliers de confection représentent plus de 750 tonnes, auxquelles s’ajoutent presque 90 tonnes de sacs plastiques saisis aux frontières.
Pour soutenir les entreprises qui produisaient des sacs plastiques jusqu’en 2016 et les accompagner dans leur reconversion, le ministère avait mis en place deux fonds. Mais seules 29 entreprises ont candidaté pour bénéficier. Selon le ministère, 25 d’entre elles ont reçu une prime globale de 65,4 millions de dirhams. « Nous restons prêts à accompagner les entreprises intéressées et les fonds ne sont pas entièrement consommés », a signalé le ministre.
Moulay Hafid Elalamy s’est réjoui, en revanche, de la réussite « exemplaire » de l’opération auprès des segments de la moyenne et grande distribution et du commerce de proximité organisé, qui ont complètement arrêté l’utilisation des sacs en plastique. De nouveaux produits de substitution comme les sacs en papier ou les sacs tissés, ont fait leur apparition. La production de sacs non tissés est passée de 1,8 à 3,2 milliards de sacs et celle des sacs tissés de 1 à 1,2 milliard de sacs durant la deuxième année de mise en œuvre de la loi. Selon le ministre, cette activité aurait permis la création de 600 nouveaux emplois.
Pour rappel, le Maroc consommait 26 milliards de sacs plastiques annuellement. Un record.
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