Fausses unions

Publié le 30 juin 2003 Lecture : 2 minutes.

Lisez, en pages 62 et 63, l’article de Ridha Kéfi intitulé « Un fantôme maghrébin ». Il vous raconte la triste histoire d’une institution handicapée de naissance : elle a 14 ans, mais ne marche toujours pas, ne parle pas et ne fait rien d’autre que coûter un peu d’argent. Un de ses pères a dit d’elle qu’elle ressemble à « un bateau sur cales ».
Ce qu’on n’en a pas dit jusqu’ici, c’est que cette handicapée est, de surcroît, mal nommée et mal constituée. Elle s’appelle l’Union du Maghreb arabe (UMA) et regroupe la Libye, la Tunisie, l’Algérie, le Maroc et la Mauritanie.

Mal nommée parce que si le Maghreb est arabisé et islamisé depuis plus de douze siècles, il n’en est pas pour autant arabe.
Les fondateurs de l’UMA ont voulu à tort ignorer que ce Maghreb de 80 millions d’âmes, qu’ils tiennent à qualifier d’Arabes, compte 20 millions de Berbères(*), soit 25 % de la population totale : un Maghrébin sur quatre est berbère et veut être reconnu comme tel !
Mal constituée parce que ses deux pays périphériques, la Libye à l’est et la Mauritanie à l’ouest, ne font pas partie du Maghreb en réalité et n’y ont adhéré que pour des raisons conjoncturelles.
La Libye est tiraillée entre le Moyen-Orient, l’Afrique subsaharienne et le Maghreb, comme le montrent les volte-face de son « Guide » et le besoin qu’il a de changer périodiquement de boussole.
Quant à la Mauritanie, limitrophe du Maroc et de l’Algérie, mais aussi du Sénégal et du Mali, elle s’est accrochée au wagon maghrébin (et arabe) par un choix de sa classe dirigeante qui ne tient pas compte de la constituante négro-africaine du pays.

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Mais il y a pire pour une organisation que d’être mal nommée et mal constituée. C’est de naître condamnée à la paralysie par un conflit entre ses deux principaux membres, l’Algérie et le Maroc, né à la fin de 1974 il y a près de trente ans ! et qui s’est révélé à ce jour inextricable.
C’était, à l’origine, une querelle de voisinage et de décolonisation, attisée par le clash entre les ego des deux chefs d’État de l’époque, Hassan II et Houari Boumedienne. Décennie après décennie, c’est devenu une affaire géostratégique sans solution en vue, coûteuse, pour ses protagonistes comme pour l’Afrique et la communauté internationale.

Tout au long de ses quatorze ans d’existence, l’UMA n’a été capable ni d’aider ses deux principaux membres à résoudre le problème qui les oppose, ni de « faire avec ».
Alors elle « persévère dans son être » et fait semblant d’exister.
Comme d’autres « organisations internationales » qui ne servent qu’à faire vivre des fonctionnaires, à faire voyager des ministres, à entretenir de faux espoirs, et qui ont pour noms Ligue arabe, Mouvement des nonalignés (sic)
Pendant ce temps, les gens sérieux, Européens et Asiatiques en particulier, dépassent leurs conflits séculaires et construisent de vraies unions.

* Dont près de 12 millions au Maroc et près de 7 millions en Algérie.

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