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Il est encore difficile de dire qui succédera au président Joaquim Chissano fin 2004.

Publié le 30 juin 2003 Lecture : 3 minutes.

En 2004, les Mozambicains célébreront le dixième anniversaire des premières élections pacifiques du pays de la meilleure manière qui soit : en se rendant aux urnes. Et, comme pour mieux ancrer la démocratie dans le pays, il s’agira d’un premier mandat pour l’homme qu’ils porteront à la magistrature suprême. Le président Joaquim Chissano a en effet annoncé il y a deux ans déjà qu’il ne se représenterait pas, bien que la Constitution l’y autorise. Son motif ? « Dix-huit ans au pouvoir, c’est trop long. » Élu pour la première fois en 1994, il occupe de fait le pouvoir depuis la mort accidentelle de Samora Machel, leader historique du Mozambique, en 1986.
Le chef de l’État, 64 ans seulement, aura certes été un peu aidé à se diriger vers la sortie par les cadres de son parti, le Front de libération du Mozambique (Frelimo). Après l’annonce de sa retraite, le parti a désigné, lors de son congrès de juin 2002, Armando Guebuza pour porter haut ses couleurs. Guebuza, vieux routier de la politique, éternel rival de Chissano, membre du gouvernement de 1974 à 1994 et actuel porte-parole du parti au Parlement, sera selon toute vraisemblance opposé dans la course au fauteuil présidentiel à Afonso Dhlakama, chef de file de la Résistance nationale mozambicaine (Renamo), l’ancienne rébellion qui s’est battue pendant quinze ans contre le Frelimo avant de signer des accords de paix en 1992.
Un peu inquiète, la population espère que ces échéances électorales – des législatives se tiendront au même moment – se dérouleront mieux qu’en 1999. Battu, Dhlakama avait alors vivement contesté les résultats et organisé des manifestations qui se terminèrent dans le sang. Soucieux de son image de bon élève des institutions internationales, respectueux de la démocratie, le Mozambique a tout intérêt à ce que les scrutins se passent dans le calme. De ce point de vue, les municipales prévues pour le 28 octobre prochain apparaissent plus que jamais comme un test essentiel. Sur le plan politique, beaucoup moins. Les enjeux locaux et nationaux étant très différents, il sera difficile de tirer des conclusions de ce suffrage. Il permettra néanmoins de juger de l’état de préparation de la Renamo, qui avait boycotté les municipales de 1998 et qui hésite encore à se présenter au sein d’une coalition de partis d’opposition.
Pour l’heure, la principale inquiétude est ailleurs. Les lois électorales votées en 1994 sont complexes et un retard conséquent à été pris pour nommer la Commission chapeautant le processus. Résultat : la date butoir du 4 juin pour la remise à jour des listes électorales a été repoussée au 26 juin et l’on craint fortement que le scrutin du 28 octobre ne soit reporté, ce qui serait un mauvais présage pour les élections générales. « Tout a été fait à la dernière minute et l’argent commence à manquer, constate Paul Fauvet, rédacteur en chef de l’Agence mozambicaine d’information (AIM). Du coup, on fait encore une fois appel à la communauté internationale. Si le pays ne se montre toujours pas capable d’organiser ses propres élections, c’est un réel problème. »
Les affaires de corruption touchant la classe politique et qui commencent à apparaître au grand jour n’arrangent rien à ce désordre. La population a ainsi été fortement marquée par le procès, entre novembre 2002 et janvier 2003, des assassins du journaliste Carlos Cardoso. Celui-ci avait été tué le 22 novembre 2000 alors qu’il enquêtait sur les 14 millions de dollars détournés à la Banque commerciale du Mozambique (BCM). L’étrange évasion à la veille de l’ouverture du procès d’Anibalzinho, l’un des principaux accusés, n’a toujours pas été expliquée et, surtout, l’enquête sur une éventuelle participation de Nyimpine Chissano, le fils du président, semble piétiner.
En attendant, il faut voter. Pour le moment, bien téméraire est celui qui se hasarde à faire des pronostics sur le nom du successeur de Chissano. Si le Frelimo, véritable machine politique, semble mieux armé pour affronter la campagne que la Renamo, celle-ci pourrait bénéficier de la lassitude exprimée par certaines franges de la population à l’égard de l’ancien parti unique, qui dirige le Mozambique depuis presque trente ans.

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