Démocratie de Bamboula

Publié le 30 juin 2003 Lecture : 2 minutes.

« À l’aune des élections africaines, le scrutin est globalement satisfaisant. » « Observateurs » et journalistes étrangers invités à « scruter » les consultations électorales sur le continent n’ont plus que cette formule à la bouche. À les écouter, à lire leur prose, les fraudes, les bourrages d’urnes et autres disqualifications d’opposants ne seraient que des broutilles. Dès lors que les citoyens votent, ils devraient s’estimer heureux. En attendant mieux.
Ce qui est indiqué pour les Européens et les Américains ne le serait donc pas pour les autres ! Dans cette affaire, il y a, à l’évidence, deux poids, deux mesures. Aux nantis, des scrutins ouverts, transparents, bref, clean. Aux Africains, des simulacres de compétition, des élections dévaluées. Un peu comme, en d’autres temps, on disait des cadres français d’un niveau très moyen qu’ils étaient juste « bons pour l’Afrique ».

La question de fond est de savoir si l’on désire que ce continent progresse comme les autres ou si l’on veut le maintenir dans son sous-développement politique, économique et culturel actuel. « L’Afrique n’est pas mûre pour la démocratie », nous enseignait il y a une dizaine d’années le professeur Jacques Chirac. De là à penser qu’elle peut (et doit) se contenter d’un minimum démocratique, il n’y a qu’un pas, allègrement franchi, ces derniers temps, par certaines organisations internationales, des ONG et quelques nostalgiques d’un passé révolu. C’est le Sénégalais Abdoulaye Wade, à l’époque opposant, qui, au sortir d’une bastille vers la fin des années quatre-vingt, déclarait, à juste titre, qu’il ne voulait pas, pour son pays, d’une « démocratie de Bamboula ».
On a tous à gagner à l’ancrage de la démocratie sur le continent. Les Africains d’abord, qui, tout comme les autres, veulent désormais tout. Ici et maintenant. Les gouvernements occidentaux, ensuite, qui doivent des comptes à leurs administrés, notamment sur les « affaires africaines », sur l’utilisation des fonds publics versés à des États voyous, et qui pourraient, par la même occasion, trouver matière à inspiration pour revigorer leur propre système politique. Après tout, un pays africain, le Cap-Vert pour ne pas le nommer, a élu son dernier président de la République, en février 2001, avec une avance de seulement treize voix. Sans susciter de vagues ni de guérilla judiciaire.
À deux amis français qui, récemment, se montraient plus que réservés sur la capacité des États africains à se faire à la « démocratie athénienne », j’ai proposé le troc suivant : « Donnez-nous Chirac ! On vous laisse volontiers Eyadéma… »

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