Aux grands hommes…
Les chefs d’Etat qui participeront au sommet de l’Union africaine, le 10 juillet prochain, pourront le constater : Maputo n’a pas totalement renié son passé. Il suffit, pour s’en rendre compte, d’arpenter le plan très géométrique de la cidade de cimento, le centre-ville construit en « dur », par opposition aux bairros, ces quartiers populaires où la tôle ondulée reste omniprésente. Aucun des leaders « progressistes » africains n’a été oublié. De Patrice Lumumba à Kwame Nkrumah en passant par Sékou Touré, Agostinho Neto ou Julius Nyerere, chacun a sa rue, son boulevard, son avenue. Même des chefs d’État plus obscurs, aujourd’hui remisés dans les oubliettes de l’histoire du continent, ont leur plaque. C’est notamment le cas du Congolais Marien Ngouabi, ou du Somalien Mohamed Siad Barre. Mais ce panthéon révolutionnaire ne se limite pas à l’Afrique, loin de là. Au fil de ces rues à angle droit, le visiteur découvrira des figures planétaires qui se côtoient de manière parfois inattendue : Mao Zedong et Hô Chi Minh disposent d’avenues parallèles, Kim Il-sung et Salvador Allende aussi !
Dans cette ex-capitale du marxisme triomphant, les pères fondateurs n’ont pas été oubliés. Karl Marx, Friedrich Engels et Lénine ont tous trois une voie à leur nom, l’auteur du Capital ayant le privilège de voir la sienne déboucher sur la Baixa, quartier où siègent les principales banques de la place. Dans ce quartier des affaires, on se souvient à peine des années de collectivisation. Ici, on parle d’investissements privés, de cash-flow et de libre entreprise.
Séduits par le tournant libéral pris par le Mozambique depuis quinze ans, certains fermiers blancs zimbabwéens, contraints de quitter leur pays pour cause de réforme agraire, ont trouvé ici un havre de paix et un pays en friche. Malgré des réflexes bureaucratiques encore pesants, les autorités mozambicaines se sont montrées très accueillantes. Il est vrai que sur 36 millions d’hectares de terres arables, seuls 4 millions sont actuellement cultivés.
Enfin, les habitants de Maputo eux-mêmes ont abandonné la révolution pour la société de consommation. Militants déçus par l’Histoire, ils aspirent seulement à un meilleur niveau de vie. Et rêvent, à l’image des classes aisées de la capitale, de traverser la frontière chaque week-end pour aller faire leurs courses en Afrique du Sud. Leurs enfants, eux, ont déjà presque oublié Kim Il-sung et Sékou Touré. Et leurs petits-enfants ne savent même pas qu’ils ont existé. Comme ces reliques que l’on conserve avec une pointe de nostalgie, la toponymie de Maputo témoigne d’une époque aujourd’hui révolue.
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