Football : mourir devant sa télé

Publié le 30 juin 2008 Lecture : 2 minutes.

La mort sur un stade d’un sportif connu suscite toujours une immense émotion médiatique. En revanche, le supporteur anonyme qui s’effondre dans une tribune ne suscite guère d’intérêt et moins encore celui qui meurt devant sa télévision en suivant un match avec passion.
La mort de spectateurs semble liée au stress, dont le rôle déclenchant dans l’apparition d’un infarctus du myocarde (IM) ou d’un accident vasculaire cérébral (AVC) a été reconnu dans d’autres circonstances : l’annonce d’un décès, au cours d’une guerre, dans un tremblement de terre, etc. Le stress entraîne une décharge d’adrénaline, qui augmente la pression artérielle, accélère le cÂur et entraîne des arythmies cardiaques qui peuvent s’avérer fatales. Plusieurs études ont été faites concernant les décès de supporteurs à l’occasion de grands événements sportifs.
Ainsi, le 22 juin 1996, quand l’équipe de France a éliminé du championnat d’Europe l’équipe néerlandaise en remportant une séance de tirs au but, on a observé aux Pays-Bas une surmortalité de 50 % par IM ou AVC. De même, en 1998 en Angleterre, on a constaté une surmortalité de 25 % par IM le jour où l’équipe nationale a été éliminée de la Coupe du monde – aux tirs au but – par l’Argentine. Une autre étude anglaise a démontré une surmortalité (par IM ou AVC) dans certaines villes quand l’équipe locale avait perdu à domicile dans le championnat national.
On peut penser que la surmortalité des supporteurs concerne les matchs à fort enjeu, joués à domicile avec adhésion d’une nombreuse population passionnée. Toute règle a ses exceptions : j’ai été témoin de la mort dans son lit d’hôpital, devant la télévision, d’un malade convalescent déplorant la défaite d’une modeste équipe à laquelle il était attaché ! D’où la suppression, dans notre clinique, de la télévision dans les chambres de malades à risques.

À l’inverse, la victoire de leur équipe réduirait-elle la mortalité ?cardio-vasculaire chez les supporteurs ? Le 12 juillet 1998, l’équipe de France devenait championne du monde de football en battant le Brésil par 3 à 0. Dans une étude rétrospective comparant la mortalité française en juin-juillet 1997 et 1998, il apparaît que la mortalité cardio-vasculaire a diminué de 25 % environ le 12 juillet, jour de la finale, et le 14 juillet, jour de la célébration de la victoire à Paris sur les Champs-Élysées. Était-ce l’effet favorable de l’euphorie ou la baisse de l’activité du pays pendant ces journées ?
Faut-il conclure que la défaite de l’équipe favorite augmente la mortalité de ses supporteurs et que sa victoire la diminue ? Ce serait trop simple. Lorsque, le 22 juin 1996, les Néerlandais vaincus ont subi la surmortalité, il n’y a pas eu de sous-mortalité chez les Français victorieux. En outre, cette surmortalité est sélective, touchant surtout les hommes de plus de 40 ans ayant déjà des facteurs de risques (hypertension, tabagisme, diabète, obésité, hypercholestérolémieÂ). Sélective aussi car épargnant les femmes, peut-être plus spectatrices que supportrices.
Soutenir son équipe, c’est bien. La soutenir sans passion déchaînée, c’est mieux.

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