Algérie : une canicule inédite, de nombreuses conséquences
Le Sud du pays connaît une vague de chaleur inédite. À Adrar, dans le Sahara, un pic à 65 degrés au soleil a été enregistré cette semaine. Les conséquences sont nombreuses, autant sur la population que sur la productivité des entreprises.
L’Algérie connaît une canicule inédite. 49 degrés Celsius (°C) à Ain Salah, au soleil, 48 °C à l’ombre à Adrar… En une semaine, l’Office national de météorologie (ONM) a émis plusieurs bulletins météorologiques aux chiffres élevés. Une semaine plus tôt, cette dernière localité avait enregistré un record de 54 °C à l’ombre et 65 °C au soleil… pour une température maximale de 46 °C en moyenne.
« Il y a eu des températures record cette année […] Il est vraiment rare qu’une vague de chaleur dure aussi longtemps », souligne un prévisionniste du Centre national des prévisions météorologiques (CNPM), organisme qui dépend de l’ONM.
De fortes chaleurs aux répercussions considérables, qui nécessitent une adaptation des populations et des activités.
Manque d’eau et d’électricité
Ces températures ont en effet été relevées à hauteur humaine, « sous abri » dans le langage scientifique (la masse d’air sous abri, à deux mètres du sol). Un climat étouffant, donc, d’autant que « la température ressentie est différente, si l’on inclut des facteurs comme le rayonnement solaire, le vent, la pollution et le taux d’humidité », précise Houaria Benrekta, chargée de communication à l’ONM.
La région a malgré tout su s’adapter à ces pics de chaleur, fréquents de juin à mi-septembre. « Tout est climatisé, le boulot, le véhicule, les magasins », explique ainsi Mustapha Abdelhak, habitant du Sud. Mais que faire quand la climatisation fait défaut ? Dans plusieurs régions, la canicule a provoqué de multiples coupures d’électricité, et rendu l’accès à l’eau courante plus difficile encore.
Dans le centre, les besoins en eau sont tels que des villageois sont contraints d’alimenter les citernes auprès de particuliers propriétaires de puits
Face à cette situation insoutenable, à Djanet (sud), les habitants sont sortis dans la rue mardi 10 juillet pour réclamer une amélioration de leurs conditions de vie et un meilleur accès aux services de base. À Béchar (sud), la pénurie d’eau potable – et le manque de logements – ont aussi fait sortir de leurs gonds les riverains.
Le centre du pays n’est pas épargné. À Bordj Bou Arreridj, par exemple, où les températures battent aussi des records, les besoins en eau sont tels que des villageois sont contraints d’alimenter les citernes auprès de particuliers propriétaires de puits.
Le ministère de la Santé et les services de la Protection civile ont émis plusieurs recommandations. Ils appellent la population à limiter les sorties et les expositions aux heures les plus chaudes ainsi qu’à s’hydrater et se vêtir correctement.
Les entreprises parapétrolières admettent que la situation est « extrêmement difficile »
Productivité en baisse
Dans le Sud, les entreprises parapétrolières admettent que la situation est « extrêmement difficile », selon Charif Ahmari, directeur des ressources humaines du groupe RedMed, qui apporte des solutions logistiques aux services pétroliers dans plusieurs villes, dont Hassi Messaoud. Année après année, ces sociétés ont dû elles aussi s’adapter.
« Sur les bases, on a parfois des petites coupures qui sont gênantes et sur les chantiers éloignés, l’énergie électrique est pourvue par des groupes électrogènes mais c’est sûr qu’il y a des problèmes d’alimentation en eau », détaille Charif Ahmari. « Nous avons aménagé les horaires pour les gens qui travaillent en pleine chaleur. Ils commencent très tôt, entre 4 h 30 et 5 heures du matin, jusqu’à midi ou 13 heures maximum ».
Le service public s’est lui aussi équipé. « Climatisation partout », explique un ingénieur de la direction des travaux publics d’Adrar. Toutefois, la situation reste contraignante pour l’ensemble de l’activité économique, RedMed enregistre par exemple une baisse de sa productivité.
Six canicules depuis début juillet
Depuis le début du mois de juillet, l’Algérie a déjà connu « six périodes caniculaires alors qu’elle en a enregistré cinq en 2017 aux mois de juin et juillet », note Houaria Benrekta. Néanmoins, l’ONM rappelle que les mois de mai et de juin ont à l’inverse été particulièrement doux avec des orages, des chutes de pluie et de grêle ainsi que des températures agréables.
L’organisme n’émet pas encore d’hypothèses concernant ces grands écarts : « Ce qu’on peut dire, c’est que notre région vit une variabilité climatique entre les saisons, qui existe puisque nous appartenons à un pays du bassin méditerranéen. En un seul mois, nous pouvons vivre des situations météorologiques tout à fait différentes », souligne sa chargée de communication.
« L’Algérie, compte tenu de sa localisation géographique, figure parmi les pays sur lesquels les incidences du réchauffement climatique risquent d’avoir les effets les plus significatifs », prévenait de son côté Fattoum Lakhdari, directrice du Centre scientifique et technique sur les régions arides (CRSTRA) à Biskra en novembre 2015, sur les antennes de la radio publique. La chercheuse en voulait pour preuve la répétition du phénomène caniculaire sur des périodes de plus en plus courtes à travers le territoire. L’été 2018 semble lui donner raison.
En attendant des températures plus clémentes, le dernier bulletin de l’ONM indique que les fortes chaleurs devraient persister jusqu’à vendredi dans la wilaya de Adrar et au nord de Tamanrasset.
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