Qu’est-ce que l’Opus Dei ?

Question posée par Marcel Plottier, Paris, France

Publié le 30 mai 2005 Lecture : 3 minutes.

Société secrète ? Communauté occulte aux objectifs inavouables ? L’Opus Dei revient périodiquement sur le devant de la scène, toujours avec une aussi mauvaise réputation. Ces derniers mois, c’est le fameux roman de Dan Brown, Da Vinci Code, qui l’a remise sous les feux des projecteurs en la présentant comme une redoutable organisation, n’hésitant pas à tuer pour préserver les mystères gardés par le Vatican. Loin des excès romanesques, qu’en est-il exactement ?
L’Opus Dei a été fondé à Madrid le 2 octobre 1928 par Josémaria Escrivá de Balaguer. Né en 1902 à Barbastro (Espagne), ce jeune prêtre élève des Jésuites madrilènes veut rassembler autour de lui des catholiques laïques et les engager à suivre un code de conduite strict, axé sur le travail et l’obéissance. Il édicte une règle, fondée sur une série de notes et de réflexions qui font l’objet d’une première publication en 1931. Au fil du temps, ces principes prendront l’aspect d’une véritable clé spirituelle, exposée dans un livre intitulé Camino [Chemin], dont la première édition paraît en 1939.
Au milieu des années 1930, l’Espagne du Front populaire, anticléricale, n’est pas un terrain propice à l’épanouissement d’une institution, qui, en dépit des apparences, forme des individus dans un esprit essentiellement religieux, destinés à composer une société civile dévotionnelle. C’est une des particularités que l’on reprochera à l’Opus Dei, cet entrisme dissimulé qui n’a rien de marxiste, bien au contraire. Il ne recrute pas des hommes destinés à être prêtres, mais les incite à agir dans leur environnement propre avec un objectif : préparer leur entourage à la foi et à l’obéissance.
Sur le plan politique, Escrivá est du côté des nationalistes. Dès les premières semaines de la guerre civile, à l’été 1936, il tombe la soutane, passe à son annulaire l’alliance de sa mère et fuit en Andorre. Il reviendra en Espagne avec l’armée franquiste. L’Opus Dei prend alors son essor, sous le regard bienveillant du général Francisco Franco, chef de l’État. Comme lui, Escrivá milite à sa façon pour une Espagne forte et catholique. Au début de la Seconde Guerre mondiale, l’Ordre est au travail dans tout le pays et, la paix revenue, il se répand en France et dans toute l’Europe. La hiérarchie est organisée : en bas de l’échelle, les agrégés, puis les surnuméraires et les numéraires. Ils sont gouvernés par des prêtres. Au sommet de la pyramide règne un prélat, ayant obligatoirement plus de cinq ans de prêtrise, élu à vie. Après le fondateur, le premier à porter le titre fut Alvaro Del Portillo. Actuellement, il s’agit de Javier Etchevarria. D’abord réservé aux hommes célibataires, l’Ordre s’est ouvert aux femmes célibataires, puis, en 1948, aux couples mariés.
Depuis 1943, Escrivá a mis en place la Société sacerdotale de la Sainte Croix. Appartenant exclusivement à l’Ordre, elle permet aux membres de recevoir les sacrements de l’Église sans faire appel aux diocèses. Cette pratique, conforme au souci de discrétion de l’Opus Dei que d’aucuns appellent « goût du secret », attire la réprobation de l’extérieur. Les jésuites voient d’un mauvais oeil cette organisation qui leur fait désormais concurrence sur le terrain du prosélytisme. Ses méthodes (les histoires abondent sur les menaces et intimidations dont ont été victimes les membres qui l’ont quitté) tout comme ses pratiques internes (Escrivá encourage les pratiques de mortifications, avec port du cilice et flagellations) et sa spiritualité posent question. Prélature personnelle de feu le pape Jean-Paul II depuis novembre 1982, c’est-à-dire ne relevant pas des évêques dans leurs diocèses mais de l’autorité directe du souverain pontife, l’Opus Dei est accusé d’être « une Église dans l’Église ». On lui reproche d’être immensément riche. N’a-t-il pas proposé, en 1974, à la banque vaticane, 60 millions de dollars pour combler son déficit ? Ses fonds propres, provenant à l’origine des cotisations des membres, sont gérés dans une totale opacité. Mais ce qui inquiète certains est sa quête réelle de pouvoir, pratiquée par un noyautage des universités et des grandes écoles, qui lui font aujourd’hui entretenir des rapports étroits avec tous les milieux décisionnaires, notamment dans les grandes entreprises. Fort de la sanctification, en 2002 et après un procès mené tambour battant, de Josémaria Escrivá de Balaguer, l’Opus Dei ne progresse plus seulement au coeur de l’Église catholique mais à tous les échelons de la société européenne avec l’objectif de faire triompher l’Occident chrétien.

Sources : L’Opus Dei, enquête sur une Église au coeur de l’Église, Bénédicte et Patrice des Mazery, éditions Flammarion, 304 pp., 20 euros, et www.opusdei.fr

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