Fin de transition chaotique

Publié le 30 mai 2005 Lecture : 3 minutes.

« Tentative de coup d’État ». C’est en ces termes que l’Union africaine (UA) a qualifié l’occupation pendant quatre heures, le 25 mai, de la présidence bissauguinéenne par l’ex-chef de l’État renversé en 2003, Kumba Yala, et un groupe de militaires. Yala a mis à exécution sa menace, formulée le 15 mai : « J’ai décidé de révoquer ma renonciation au pouvoir et de le reprendre dès aujourd’hui, 15 mai, en tant que président élu. » L’intercession du chef de l’État sénégalais, Abdoulaye Wade, qui l’a invité, le 22 mai, à Dakar pour le « raisonner », n’y a rien fait. Encore moins les dispositions prises par le pouvoir de transition dirigé par le président par intérim Henrique Rosa. Celui-ci avait, dès le 15 mai, convoqué un Conseil des ministres extraordinaire, ordonné le renforcement du dispositif de sécurité autour du palais et joint quelques chefs d’État de la sous-région. Une cellule de crise s’est réunie dans la matinée du 16 mai, composée de Rosa, de son ministre de la Défense Martinho Ndafa Cadi et des principaux chefs de l’armée et de la police. Un communiqué rendu public à l’issue de la rencontre réaffirmait la loyauté des forces légales envers les institutions de la transition et précisait que « l’armée de la Guinée-Bissau, garante de la stabilité et de la défense nationale, ne permettra pas d’actes d’indiscipline et d’anarchie de nature à remettre en question les valeurs de démocratie, de justice, de paix et de stabilité ».

Une diplomatie secrète s’est déployée dans la foulée. Wade a dépêché à Abuja son homme des missions délicates, Cheikh Tidiane Sy (ministre d’État porté à la tête du département de la Justice le 18 mai) auprès de ses homologues nigérian Olusegun Obasanjo et nigérien Mamadou Tandja, respectivement présidents en exercice de l’UA et de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao), réunis en minisommet avec les protagonistes de la crise togolaise.

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Tandja et Obasanjo ont accepté d’aller sur place pour s’entretenir avec les acteurs politiques bissauguinéens. Le premier s’y est rendu directement, le 21 mai. Le second est passé par Dakar avant de regagner Bissau en compagnie de Wade. Invité, le chef de l’État guinéen Lansana Conté s’est fait représenter par son Premier ministre, Cellou Dalein Diallo. La délégation a rencontré Henrique Rosa, Kumba Yala et d’autres leaders politiques, auxquels elle a tenu un langage dépourvu de toute fioriture diplomatique. Les responsables bissauguinéens se sont entendu dire que l’UA et la Cedeao ne toléreraient aucune forme de désordre et que tout auteur d’une perturbation quelconque du processus de transition devra en répondre.
Kumba Yala a malgré tout tenu à exprimer à ses ex-homologues ses réserves sur les reports successifs de la présidentielle. Pour le dissuader de prendre la moindre initiative susceptible de perturber la transition, Obasanjo et Tandja ont chargé Wade de maintenir le dialogue avec lui. Cette décision n’a rien de fortuit : Yala a beaucoup d’égards pour le numéro un sénégalais, qui l’a soutenu quand il était à la tête de la Guinée-Bissau.

Les pourparlers avec Yala n’ont apparemment pas porté leurs fruits. L’ex-chef de l’État, de l’ethnie balante, comme 70 % des officiers de l’armée, fait planer une réelle menace sur la transition. L’autre incertitude tient à la difficulté de tenir l’échéance électorale du 19 juin. L’organisation de la présidentielle requiert des moyens que le pays est loin de détenir. Et l’aide internationale tarde à se manifester. Ce n’est que le 24 mai que l’Union européenne a annoncé l’approbation d’une enveloppe de 9 millions d’euros, dont 1,5 million destiné à financer la consultation. Les autres bailleurs de fonds tardent à mettre leur contribution à disposition, telle la France, qui a annoncé un don de 500 000 euros.

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