Les Françaises votent pour la première fois

Publié le 30 avril 2007 Lecture : 3 minutes.

Quatre candidates, le 22 avril 2007, à la présidence de la République. Et l’une d’entre
elles, Ségolène Royal, en mesure de l’emporter au second tour, le 6 mai. Ce pays, qui, après avoir inventé les droits de l’homme, a longtemps oublié ceux de la femme, est-il en
passe de rattraper son retard sur les autres nations occidentales ? Ce n’est en effet qu’au sortir de la Seconde Guerre mondiale que le droit de vote a été accordé aux
Françaises. Après qu’une ordonnance signée à Alger, le 21 avril 1944, par le général de Gaulle, eut stipulé que « les femmes sont électrices et éligibles dans les mêmes
conditions que les hommes », elles déposaient pour la première fois un bulletin dans les urnes le 29 avril 1945, à l’occasion des élections municipales.
Il était temps ! Les Néo-Zélandaises votaient depuis 1893, les Australiennes leur avaient emboîté le pas en 1902, les Finlandaises en 1906, les Norvégiennes en 1913. Après la Première Guerre mondiale, le mouvement d’émancipation des femmes avait pris de l’ampleur. Le droit de vote leur fut accordé aux États-Unis, au Royaume-Uni, en Allemagne et dans un grand nombre d’autres pays d’Europe. Les Indiennes et les Turques étaient devenues elles aussi des citoyennes à part entière en 1921 et en 1934.

Des facteurs historiques expliquent pourquoi la France, qui avait institué le suffrage universel masculin dès 1848, rechignait à étendre ce droit à l’autre sexe. On sait que, sous la monarchie, la loi salique interdisait aux femmes de monter sur le trône. Or les révolutionnaires de 1789 reprirent à leur compte cette tradition : s’ils accordèrent la citoyenneté civile aux femmes, ils leur refusèrent la citoyenneté politique. Cette exclusion marqua durablement le camp républicain, convaincu de l’incompétence politique
des femmes. Elles ne pourraient que suivre les consignes de leur mari ou du curé, estimait-on alors à gauche.
À tel point qu’entre les deux guerres le Sénat, dominé par le courant radical-socialiste, repoussa à six reprises des textes de loi en faveur du vote féminin adoptés par la Chambre des députés. Il fallut attendre la défaite de 1940 et l’occupation allemande pour que les femmes, nombreuses à s’engager dans la Résistance, se voient reconnaître, sous l’insistance des communistes, l’égalité politique.
Les municipales du 29 avril 1945 n’eurent pas un très grand retentissement. Les choses sérieuses commencèrent en octobre 1945 avec la désignation de l’Assemblée constituante. Trente-trois femmes furent élues députées. Une entrée en matière pleine de promesses que les décennies suivantes, hélas, ne confirmèrent pas. Jusqu’à la fin des années 1990, le nombre d’élues à l’Assemblée stagnait aux environs de 30, soit 5 % du total des députés.
Il fallut attendre 1997 pour que ce nombre double grâce aux efforts du Parti socialiste.

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Au début, la participation des femmes aux élections conforta le point de vue des sceptiques. Beaucoup plus nombreuses à s’abstenir, elles penchaient aussi nettement à droite. Sous la IVe République (1946-1958), elles apportèrent un large soutien aux démocrates-chrétiens du MRP (Mouvement républicain populaire). Ensuite, elles
rejoignirent massivement le camp gaulliste : sans le suffrage féminin, François Mitterrand aurait battu le général de Gaulle à la présidentielle de 1965
Mais le pays connaissait des changements socioéconomiques profonds. Premières bénéficiaires de la démocratisation de l’enseignement, les femmes entraient en masse dans l’administration et dans les entreprises privées. La montée des revendications féministes s’accompagnait d’un déclin des valeurs chrétiennes traditionnelles. Autant d’évolutions qui conduisaient les femmes à grossir les rangs de la « gauche sociologique ». Aux législatives de 1981, elles votaient majoritairement en faveur des partis de la nouvelle majorité constituée autour de Mitterrand. La gauche française s’était enfin réconciliée avec les femmes.

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