Avec la biomasse, Sifca voit l’avenir en vert
Épaulé par EDF, le géant ivoirien mise sur les énergies renouvelables. Un moyen de valoriser les déchets de ses exploitations et d’offrir des revenus supplémentaires à ses planteurs.
Arrêt de ses activités au Liberia, cours du caoutchouc en chute libre… Sifca, qui tire environ la moitié de ses revenus de cette ressource, a connu des temps meilleurs. Mais du côté de Vridi, zone industrielle d’Abidjan où se situe le siège du premier groupe privé ivoirien, on sait faire face aux soubresauts du prix des produits agricoles et aux difficultés politiques. Le plan d’investissement de 318,5 millions d’euros, lancé mi-2013 pour huit ans, a certes été un peu ralenti, mais reste en application. Surtout, on mise beaucoup sur ce qui devrait devenir, d’ici à quelques années, le quatrième grand pôle de production de Sifca, avec le caoutchouc, l’huile de palme et le sucre : les énergies renouvelables.
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Une petite équipe est derrière ce projet, né en 2008 : David Billon, le plus jeune de la fratrie actionnaire de référence de Sifca, ainsi qu’Olivier Kergall, Yapi Ogou, Yacouba Bado et Franck Eba, conseiller développement durable du groupe. « L’idée a germé lors de voyages au Canada puis en Chine, où j’ai rencontré les équipes de Dragon Power. Leur filiale DP Cleantech est un leader dans l’énergie tirée de la biomasse », explique-t-il. « En Côte d’Ivoire, il faut que nous trouvions d’autres ressources que le gaz. L’hydroélectricité ne suffira pas. »
Deux ans plus tard, le jeune quadra convainc Yves Lambelin, dirigeant historique de Sifca (disparu en 2011), de l’utilité d’une diversification énergétique. Le groupe ouest-africain a en effet un accès potentiel à d’énormes stocks de biomasse, dans ses propres plantations de palmiers et d’hévéas, comme dans celles des planteurs partenaires. Pourquoi laisser les déchets issus de leurs exploitations se décomposer sur place, alors qu’ils pourraient servir à produire de l’énergie ?
Stabilité
Séduit par l’idée, Yves Lambelin y voit deux intérêts, tout comme les actionnaires et les dirigeants. D’une part, développer un pôle d’activité plus stable, beaucoup moins soumis aux fluctuations parfois impressionnantes des prix du caoutchouc, de l’huile de palme ou du sucre. D’autre part, « permettre aux petits planteurs de dégager, via la vente des feuilles de palmiers, des revenus supplémentaires, explique David Billon. Ceux-ci pourraient être utilisés pour améliorer les rendements par hectare – qui s’élèvent à 8 tonnes pour les planteurs ivoiriens, contre 20 à 25 tonnes en Malaisie -, ainsi que pour replanter. »
« Si c’est un succès, nous en construirons cinq ou six autres en Côte d’Ivoire », souligne David Billon.
À Aboisso, la première centrale électrique du groupe utilisant des feuilles de palmiers devrait ouvrir en 2017. Celles-ci seront collectées par Sifca (en alternance, pour qu’elles conservent leur rôle de fertilisant) sur 40 000 hectares de plantations, dont 70 % détenus par des paysans. Fin septembre, le projet a connu une grande avancée : la signature d’un accord-cadre avec Électricité de France (EDF), partenaire technique et, selon nos informations, actionnaire à hauteur de 40 % de la société portant le projet, Biokala.
Sifca doit désormais finaliser les discussions avec l’État ivoirien, puisque l’électricité produite sera injectée dans le réseau national. Une première en Afrique, où les centrales à biomasse sont consacrées à l’alimentation d’une ou de deux industries. Le prix d’achat fixé par l’État devrait logiquement se situer entre celui de l’hydroélectricité et celui du thermique. La centrale pourrait à terme (son développement est prévu en deux phases de 23 MW) générer environ 300 GWh d’électricité, plus de 700 emplois et, selon nos estimations, une quarantaine de millions d’euros de revenus annuels.
« Si c’est un succès, nous en construirons cinq ou six autres en Côte d’Ivoire, souligne David Billon. Et nous essaierons de convaincre d’autres pays d’emprunter le même chemin. » Présent au Nigeria, au Ghana et au Liberia, Sifca dispose en effet de quelques millions de tonnes de biomasse non utilisées.
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