Chine : le cinéma aussi !

Publié le 30 avril 2007 Lecture : 2 minutes.

Après Platform et The World, le dernier film de Jia Zang Ke, Still Life, Lion d’or au dernier festival de Venise, confirme l’énorme talent de ce porte-drapeau de la nouvelle génération de cinéastes chinois. Un talent d’autant plus apparent que cet auteur, né en 1970, arrive à surprendre, captiver et éblouir le spectateur avec des films aux thèmes
très minimalistes, dans lesquels la nature et le contexte hors champ comptent autant que le scénario.
Still Life, au premier abord, suit tout simplement deux personnages, un homme et une femme, qui, sans jamais se rencontrer bien qu’ils se croiseront une fois, viennent d’arriver dans la même province de Chine. Les deux voyageurs recherchent là, dans un paysage qui frappe d’abord par son aspect grandiose, des êtres qui leur sont chers l’un sa femme et sa fille, l’autre son mari perdus de vue depuis plusieurs années après qu’ils ont quitté la région. Ils errent sans trop savoir quand ni même si ils obtiendront des nouvelles de ces ex-proches qui pourraient aussi bien ne pas souhaiter les revoir. Leur quête de renseignements est peu fructueuse et, pour eux comme pour ceux
qu’ils rencontrent, il semble qu’il ne se passe d’ailleurs quasiment rien, sinon ces petites choses qui font la vie quotidienne de tout un chacun.
Mais, alors qu’ils devraient arpenter des lieux familiers, ils ont retrouvé un site en plein bouleversement. La ville où ils ont posé leur maigre bagage et ses environs sont en effet voués à disparaître en quasi-totalité sous les eaux puisque s’achèvera bientôt en amont la construction du barrage hydroélectrique des Trois Gorges, le plus grand de la planète. Nous assistons donc à la fois à une histoire presque immobile et à l’Histoire en train de se faire, celle de la grande transformation de la Chine avec, d’une part, son côté spectaculaire et constructif et, d’autre part, les drames humains et les destructions matérielles ou culturelles qui l’accompagnent.
Son titre même, évoquant à la fois le travail du peintre « classique » still life signifie en anglais « nature morte » et le changement à la lettre, il pourrait être
traduit par « encore la vie » , renvoie indirectement à cette double dimension de l’oeuvre, contemplative et dynamique, esthétique et politique, passée et future.
L’incorporation dans le film de deux brèves scènes fantastiques notamment un immeuble qui s’envole grâce aux effets que permet le tournage en numérique vient renforcer cette conjonction du naturalisme et de la poésie.
Cette réussite remarquable d’un cinéaste qui était encore « underground » il y a peu témoigne une nouvelle fois de la vitalité de la cinématographie chinoise depuis la fin du siècle dernier. Avec aussi bien ses succès commerciaux comme les récents Hero et La Cité interdite de Yang Zhimou qu’avec ses films « art et essai » comme Still Life, elle domine de plus en plus la production asiatique. Et l’avenir s’annonce bien, puisque, peu soutenu par le régime jusqu’à récemment, le cinéma chinois est en pleine expansion. Quelque 300 films ont été réalisés en 2006 contre 200 l’année précédente. Et 300 nouvelles salles ont ouvert en 2006, laissant espérer que le parc des écrans va être multiplié par quatre d’ici à 2015. De quoi encourager tous les créateurs d’images locaux à ne jamais renoncer à leur vocation, d’autant que le pays entend ne pas se laisser coloniser par Hollywood.

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