Naissance d’une légende

Norah Jones a vendu 18 millions d’exemplaires de son premier album « Come Away with Me ». Elle pourrait bien récidiver.

Publié le 1 mars 2004 Lecture : 3 minutes.

L’engouement est planétaire. Une semaine après son apparition dans les bacs, le très attendu Feels Like Home(*), second album de la chanteuse-pianiste américaine Norah Jones, caracole en tête des ventes aux États-Unis et en Europe. Un million d’exemplaires outre-Atlantique, 250 000 en Grande- Bretagne, plus de 100 000 en France. N’en déplaise à ses détracteurs, la jeune métisse, fruit des amours du célèbre sitariste indien Ravi Shankar et de l’organisatrice de concerts Sue Jones, récidive. Et la deuxième livraison de Miss Jones prend le chemin de la première, Come Away with Me, qui a vu le jour en mars 2002 et s’est écoulé à 18 millions d’exemplaires. Un chiffre rarement égalé pour un premier album. Qui aurait imaginé, il y a deux ans, qu’à l’ère des Shakira et des Britney Spears, une enfant sage interprétant de lentes mélodies jazzy puisse faire exploser le disk office mondial ?
Le conte de fées débute en 2001, le jour où Bruce Lundvall, directeur du label de jazz Blue Note, l’auditionne dans son bureau. À l’époque, Norah Jones est serveuse dans un café de Manhattan. Pianiste aguerrie, diplômée de l’université de North Texas, elle joue plusieurs soirs par semaine au Living Room, une salle new-yorkaise d’une centaine de places, et vient d’autoproduire une démo de quelques titres avec le groupe de musiciens qui l’accompagne. Après trois chansons, Lundvall, sous le charme, sort son stylo… Quelques semaines plus tard, la jeune fille commence à enregistrer. Elle a 22 ans.
On lui offre comme producteur le célèbre Arif Mardin, qui a travaillé avec Aretha Franklin et David Bowie. Quelques mois plus tard, l’album qui mélange jazz, folk et country, compositions et reprises, sort des studios. Un récital intime, qui relève plus des soirées tranquilles au coin du feu que des nuits blanches sur les dance floors, une voix chaleureuse, des arrangements réduits au minimum, un disque que l’on pourrait qualifier de minimaliste. À l’image de son auteur, cette jeune madone à la longue chevelure noire et bouclée, Come Away with Me respire la simplicité.
Les débuts de l’album sont prometteurs, le bouche à oreille fonctionne et les concerts de la belle inconnue affichent complet. Les radios new-yorkaises passent en boucle « Don’t know why » ; la machine s’emballe : tournée, interviews, télévision, le phénomène Norah Jones est né. La consécration vient en 2003. Elle remporte huit Grammy Awards, les « oscars de la musique » américains. Dès lors la success story ne connaît plus de limite. Mais l’étoile, qui sous ses airs d’ange fait preuve d’une réelle détermination, refuse d’entrer dans le star system. Soucieuse de son image, elle contrôle ses apparitions… et ses disparitions. Ainsi, mademoiselle Jones s’offre de longues vacances en amoureux avec Lee Alexander, le bassiste du groupe, coauteur de plusieurs chansons. Avant de reprendre le chemin des studios.
Feels Like Home reprend tous les ingrédients de Come Away with Me : mêmes couleurs, mêmes ambiances et mêmes influences. Les musiques qui ont bercé son enfance auprès d’une mère séparée d’un père qu’elle a perdu de vue pendant de nombreuses années, avant de le retrouver. Mais la jeune fille est devenue femme. Sa musique est plus riche, ses paroles plus profondes et le charme joue toujours. Un charme naturel, sans frous-frous ni paillettes, qui a conquis un public las, peut-être, des artistes artificielles et formatées.
Aux dires de ses proches, Norah est parvenue à garder la tête froide face à un succès qui laisse nombre de critiques sans voix. L’intéressée elle-même, qui rêvait au moment de la sortie de Come Away with Me de vendre dix mille albums, ne cache pas sa surprise, ni sa joie, d’avoir gravi si vite tous les échelons de la gloire. Chez Blue Note, on admet avoir été pris de cours par cette ascension fulgurante. Un phénomène unique de mémoire de distributeur. « L’album m’a tout de suite séduit. Mais dans le monde actuel, je ne pensais pas qu’il dépasserait les 50 000 ventes », explique Nicolas Pflug, responsable du label dans l’Hexagone. Avant d’ajouter que dans le cas où Feels like home réaliserait le même exploit, Miss Jones ne manquerait pas de passer du statut de curiosité à celui de légende.

* Feels Like Home, 17 euros.

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