Fantasmes et réalités
Publié le 2 mars 2004 Lecture : 1 minute.
Faut-il parler de mystification ? Ou de fantasme ? Ou de manipulation ? Ou de réalité ? Ces temps-ci, la question de l’antisémitisme empoisonne l’Europe, particulièrement la France, créant un climat de suspicion et de tension. Au point, pour prendre quelques exemples, que l’Union européenne a jugé nécessaire de réunir un séminaire sur ce sujet et que le problème a été au centre de la visite d’État effectuée récemment par le président
israélien à Paris. Au point encore que la charge de Dieudonné contre Israël donne lieu à une polémique intense et a déjà entraîné l’annulation de plusieurs représentations de
l’humoriste français. Bref, un nouvel antisémitisme est-il en train de naître ? Les organisations juives le proclament ; d’autres, le gouvernement français le premier, le démentent. Il serait absurde, en tout cas, de nier que la question se pose et, intellectuellement, lâche de ne pas tenter d’y répondre. Aussi, pour y voir plus clair, il faut ouvrir le dossier. C’est ce que nous faisons dans les pages suivantes. Autant en rappelant les contours du débat, comme le fait René Guyonnet, qu’en donnant la parole à Uri Avnery, dirigeant du mouvement de la paix israélien Gush Shalom. Encore est-il nécessaire de s’entendre sur les termes. D’où l’importance de la contribution d’Edgar
Morin, qui établit les distinctions entre antisémitisme, antijudaïsme et anti-israélisme. Mais tous en sont convaincus et le démontrent : cette question n’est pas théorique et ne peut être évoquée sans tenir compte du drame palestinien. Surtout quand Israël considère
volontiers que la moindre réserve sur sa politique est une manifestation d’antisémitisme
et espère de cette manière se protéger contre toute critique. Cette rhétorique ne permet
évidemment pas de trouver des solutions à la tragédie du conflit israélo-palestinien. Comme le conclut Edgar Morin : « Que de désastres en perspective si l’on n’arrive pas à faire entrer le réalisme dans le réel. »
