Agadir ravagé par un séisme

Publié le 3 mars 2004 Lecture : 3 minutes.

Le 29 février 1960, vingt minutes avant minuit, le sol se dérobe sous les pieds des 40 000 habitants du port marocain d’Agadir. Les rescapés décriront le bruit montant des profondeurs de la terre et éclatant à la surface du sol comme une salve de coups de canon. Toute la ville ondule et se tord pendant les quinze secondes que dure la secousse. Les lueurs rougeâtres et bleutées qui illuminent le ciel éclairent un spectacle apocalyptique : une ville entière s’effondrant dans une odeur de soufre. La chute de centaines d’immeubles a provoqué un nuage de poussière qui enveloppe tout. Quelques secondes encore et des hurlements se font entendre sous les décombres. Le centre-ville, proche de l’épicentre du séisme (qui a atteint une magnitude de 7 sur une échelle de 10), a été entièrement ravagé. Des milliers de personnes ont été ensevelies sur le plateau du Talbordj et dans les vieux quartiers espagnols de Founti et de la Casbah. Le quartier israélite est un amoncellement de pierres et de fer.
De mémoire d’homme, rien de tel ne s’était jamais produit. Ce qui explique que la secousse prémonitoire de 11 heures le 29 février n’a affolé personne. Seule la pierre gravée sur le fronton de la porte de la Casbah gardait le souvenir du séisme de 1731 qui avait détruit la ville. À 2 h 30, le 24 février 2004, la terre tremblera de nouveau sur la côte marocaine, rappelant aux hommes la menace de cette faille souterraine qui court le long du nord de l’Afrique (voir pp. 12-14).
Si quelques miracles se sont produits, comme les quatre cents patients évacués sains et saufs de l’hôpital ou cette femme retrouvée hagarde avec son fils sur sa terrasse tombée du quatrième étage au niveau de la rue, le tremblement de terre du 29 février 1960 a tué près de 15 000 personnes et fait plus de 4 000 blessés. Seuls 4 000 corps seront retrouvés et pour la plupart enterrés dans des fosses communes.
Les survivants se ruent vers la base aéronavale française, aux portes de la ville, dont les groupes électrogènes fournissent le seul îlot de lumière. Les casernes et les immeubles dans lesquels étaient logés la gendarmerie, la police et l’armée royale marocaines se sont effondrés sur leurs occupants. Il faudra toute la nuit aux forces de l’ordre chérifiennes pour se compter, sauver ceux qui peuvent encore l’être et se réorganiser. À 1 h 11, le capitaine de frégate Thorette, commandant de la base aéronavale française, informe l’état-major de la marine à Casablanca avec ce message : « Vous rends compte violent séisme à Agadir. Ville détruite aux trois quarts. »

Le 1er mars au matin, le roi Mohammed V se rend sur les lieux du drame et organise les secours nationaux. Une formidable chaîne de solidarité internationale permet de recueillir des fonds, des médicaments et de la nourriture. Des centaines de médecins de tous pays sont dépêchés sur les lieux alors que du matériel chirurgical est acheminé. Au terme d’un ballet aérien incessant, 2 000 blessés graves sont répartis dans les principaux hôpitaux de la région en quelques jours.
Le risque d’épidémies plane rapidement sur les 20 000 sinistrés qui campent encore sur les hauteurs de la ville et les milliers de sauveteurs qui s’acharnent à extraire des survivants des décombres. À Rabat, les réunions de crise se succèdent. La ville échappe au dynamitage et au napalm un temps envisagés. Le 5 mars, elle est bouclée pour quarante jours. On déverse des tonnes de chlorure de chaux et de DDT sur les zones où nul espoir ne demeure de trouver le moindre signe de vie. Le 20 mars, les premiers civils – les patrons des conserveries du port et des experts en bâtiment venus mesurer l’ampleur des dégâts – foulent à nouveau le sol de la ville martyre. Ce qui peut être récupéré par les rescapés le sera sous bonne garde, avant que les travaux de déblaiement commencent, le 30 juin.

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