L’assassinat de Gandhi

Publié le 31 janvier 2006 Lecture : 3 minutes.

Il est à peine 17 heures, ce 30 janvier 1948. Comme chaque jour, vêtu de son traditionnel habit blanc, le mahatma Gandhi (78 ans) traverse lentement, soutenu par deux femmes, le jardin de Birla House, la maison de New Delhi où il réside pour se rendre à la prière. Alors qu’il salue la foule les mains jointes, un homme d’une trentaine d’années l’approche, dégaine un revolver et tire sur lui à trois reprises, à bout portant. Touché à l’estomac, à l’aine et à l’épaule, l’apôtre de la non-violence s’effondre. Aussitôt reconduit dans ses appartements, Mohandas Karamchand Gandhi décède une demi-heure plus tard.

Nathuram Vinayak Godse, son assassin, est l’un de ces fanatiques hindouistes qui reprochent au père de l’indépendance sa trop grande complaisance à l’égard des musulmans. Arrêté sur-le-champ par la police, après avoir vainement tenté de retourner l’arme contre lui, il est pris à partie par la foule et échappe de justesse au lynchage. La nuit tombée, le Premier ministre Jawaharlal Nehru, son compagnon de la première heure dans la lutte pour l’indépendance, apparaît sur les écrans de télévision et prononce une allocution, d’une voix tremblante : « Le père de la nation n’est plus. Le meilleur hommage que nous puissions lui rendre est de nous vouer sans relâche à la cause pour laquelle notre grand homme a vécu et est mort. » Le lendemain, plus d’un million d’Indiens assistent aux funérailles. Enveloppé dans le drapeau national et couvert de fleurs, le corps de Gandhi est brûlé, conformément au rite hindouiste, sur un bûcher dressé sur la rive du Jumna, un fleuve sacré. Selon sa volonté, ses cendres seront disséminées aux quatre coins de ce pays que, l’année précédente, il était parvenu à sortir du giron britannique.

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Rien ne prédestinait ce fils de riches marchands né en 1869 dans l’État du Gujerat (nord-ouest de l’Inde) à devenir le mahatma – la « grande âme », en hindi -, surnom qui lui fut donné par le poète Rabindranath Tagore. Après des études de droit en métropole, il devient avocat et s’installe en Afrique du Sud. C’est là que tout bascule. Écuré par le racisme des Blancs, il s’érige en défenseur des immigrants indiens et préconise la désobéissance civile pour lutter contre la discrimination. En 1915, il rentre au pays après plus de vingt ans d’absence et, très vite, prend la tête du parti du Congrès et de la lutte pour l’indépendance. Faisant le choix de l’ascétisme, celui que Winston Churchill surnommera, non sans mépris, le « fakir à moitié nu », parcourt les campagnes pour y prêcher la désobéissance et le retour aux valeurs traditionnelles. Régulièrement, il se réfugie dans son ashram, où il tisse le coton sur son rouet.

Grèves de la faim, non-respect des lois britanniques et manifestations non violentes (comme la très symbolique Marche du sel, qui, en 1930, mettra fin au monopole d’État sur la collecte du sel) vaudront à Gandhi plusieurs années d’emprisonnement. Mais tout cela finira par amener la Couronne à accorder l’indépendance au « Raj » (les Indes britanniques). Mais le mahatma, dont l’aura est devenue internationale, ne parviendra pas à réaliser son rêve d’une Inde unie, par-delà les divisions de castes et de religions. Le 15 août 1947, il assistera, impuissant, à la partition de l’empire et à la naissance des deux frères ennemis : l’Inde hindoue et le Pakistan musulman. S’ensuivront d’épouvantables massacres intercommunautaires qui feront plusieurs centaines de milliers de victimes. ¦

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