Cameroun : les entreprises victimes de la crise anglophone

Le maire de Buea, capitale de la région du Sud-Ouest secouée depuis bientôt deux ans par une crise socio-politique, avait fait apposer des scellés sur les portes des entreprises qui ferment boutique chaque lundi, pour respecter la consigne de « ville morte » décidée par le mouvement sécessionniste anglophone. Il est finalement revenu sur cette décision.

Marché de Buea © Bmnda, CC, wikimedia Commons

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Publié le 26 juillet 2018 Lecture : 2 minutes.

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Cameroun : les véritables victimes de la crise anglophone

La crise qui sévit dans les régions anglophone du Cameroun depuis plus d’un an, qui voit des violences récurrentes entre sécessionnistes armés et forces gouvernementales, ne faiblit pas. De l’Église aux entreprises en passant par les populations, le point sur les victimes et conséquences de ce conflit qui s’installe dans la durée.

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Soulagement chez les opérateurs Orange, MTN et Nexttel. Au terme d’une longue concertation, Patrick Ekema Esunge, le maire de la ville de Buea, a décidé dans l’après-midi du 25 juillet de lever les scellés qu’il avait fait apposer deux jours plus tôt aux portes des locaux desdites entreprises. La veille, les agences bancaires de la Bicec (groupe BPCE) et d’Ecobank Cameroun étaient autorisées à rouvrir, en cette période de paiement des salaires des agents publics.

La sanction avait touché une centaine d’entreprises, des PME pour la plupart, dont les bureaux se trouvent sur la principale avenue de capitale de la région du Sud-Ouest, et à qui le maire reproche de n’avoir pas ouvert leurs portes le lundi 23 juillet, souvent par peur de représailles de la part des sécessionnistes qui imposent une journée ville morte au début de chaque semaine dans les régions anglophones du Nord-Ouest et du Sud-Ouest.

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Peur des représailles

Les opérateurs économiques doivent remplir deux conditions pour bénéficier de la mansuétude de l’édile : « Elles doivent signer un engagement de ne plus recommencer et payer l’impôt libératoire que certaines n’ont pas acquitté depuis deux ans au moins », expose Patrick Ekema, contacté par Jeune Afrique.

>>> À LIRE : Au Cameroun anglophone, Buea, une fac aux racines de la guerre

Un comportement insupportable pour Patrick Ekema qui estime que ces opérateurs économiques font le jeu des « bandits ». « J’ai pourtant tenu une réunion de sensibilisation il y a deux semaines, en compagnie des responsables du maintien de l’ordre, pour leur donner des assurances quant à la sécurité de leurs installations. Constatant qu’ils ont respecté le mot d’ordre de ville morte la semaine dernière, j’ai rédigé un communiqué de rappel. Cette fois, je leur impose aussi la ville morte », martèle-t-il.

Les assurances du maire ne semblent pas convaincre des entreprises prises entre le marteau sécessionniste et l’enclume de l’autorité municipale. D’autant que Patrick Ekema avait déjà usé de la même démarche il y a cinq mois. « Nos employés et leur famille font l’objet de menaces permanentes dans leur lieu d’habitation où les gendarmes et les militaires ne peuvent les protéger. La pression est telle que certains vivent dans un stress permanent et beaucoup exigent d’être affectés hors de ces régions », confie sous anonymat un cadre d’un opérateur de téléphonie.

Les taxis bientôt concernés ?

« Depuis deux ans, une dizaine de mes collaborateurs ont été kidnappés, sans compter les pertes financières enregistrées du fait de la baisse d’activité », renchérit le responsable d’une entreprise spécialisée dans la finance. Des arguments loin de toucher le maire qui a l’intention de s’attaquer à une autre cible. « Si les taximen continuent de respecter le mot d’ordre des sécessionnistes, j’enverrai les véhicules à la fourrière la semaine prochaine », tranche-t-il.

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La crise sociopolitique, sur fond de revendications sécessionnistes, qui affecte le Cameroun anglophone depuis bientôt deux années impacte sérieusement l’économie de ces deux régions. « Les pertes d’activités sont importantes. Elles atteignent 5 % pour certains établissements bancaires et jusqu’à 50 % pour des entreprises de distribution », faisait récemment valoir le président du Groupement inter-patronal du Cameroun (Gicam), Célestin Tawamba.

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