Comment les attaques dans le sud du Rwanda ont ravivé les tensions entre le Burundi et la Belgique
Après la tension diplomatique et sécuritaire entre Bujumbura et Kigali née de l’attaque survenue le 1er juillet dans le sud du Rwanda, la Belgique a été vilipendée par les autorités burundaises pour avoir relayé l’information sur le site internet de son ministère des Affaires étrangères. Retour sur ce nouvel épisode de crispation.
L’étincelle qui a remis le feu aux poudres des tensions diplomatiques entre Bruxelles et Bujumbura est venue sous la forme d’une mise à jour du texte portant « conseil aux voyageurs » du site internet du ministère belge des Affaires étrangères. « Les frontières Nord-Ouest (Nord-Kivu, en République démocratique du Congo) et Sud-Ouest (Sud-Kivu, en RDC et au Burundi) du Rwanda sont régulièrement le théâtre d’affrontement. Il arrive que [des] groupes armés venant de la République démocratique du Congo, et plus récemment du Burundi (aux alentours de la forêt de Nyungwe) s’infiltrent en territoire rwandais », lisait-on le 23 juillet sur la page dédiée au Rwanda.
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« Groupes armés »
En creux, la diplomatie belge accrédite donc la thèse que les attaques menées dans le sud du Rwanda, dont celle du 1er juillet à Nyaruguru, ont été le fait de mouvements armés ayant trouvé refuge au Burundi.
Une thèse démentie par Kigali, qui préfère évoquer des « bandits » et qualifie de « rumeurs vides » les allégations d’incursions menées par des membres du Mouvement rwandais pour le changement démocratique (MRCD), une formation rebelle en exil née de la convergence de différents courants d’opposition au Front patriotique rwandais (FPR) de Paul Kagame, qui a annoncé mi-juillet avoir constitué une branche armée, les Forces nationales de libération (FNL).
A Bujumbura, le tollé a été immédiat. Bruxelles « joue à un jeu très dangereux…qui risque d’embraser toute la région », a prévenu Willy Nyamitwe, conseiller du président chargé de la presse et de la communication, bientôt suivi sur les réseaux sociaux par une avalanche de critiques envers la Belgique de la part des communicants proche du pouvoir.
Un martèlement de tambours qui a semble-t-il porté jusqu’aux oreilles des services diplomatiques belges : la mention de « groupes armés » « venant (…) du Burundi » a disparu du texte dans les trois jours qui ont suivi.
Axe de tensions : Bruxelles, Bujumbura, Kigali
« La Belgique a pris bonne note de ma proposition et a retiré cette information que je qualifie de mensongère », se félicite Willy Nyamitwe, contacté par Jeune Afrique. Du côté de Bruxelles, on réfute avoir cédé à une quelconque demande ou à des pressions émanant de Bujumbura. « Il s’agit d’avis de voyages essentiellement pratiques et s’adressent aux Belges qui sont en déplacement à l’étranger, et qui couvrent l’ensemble des pays du monde. Ces avis sont simplement régulièrement mis à jour », assure Matthieu Branders, porte-parole du ministère belge des Affaires étrangères.
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Une explication qui peine à convaincre, étant donnée la fragilité de la situation dans la région, où chaque mot mal pesé peut donner lieu à une escalade diplomatique. Cet épisode illustre également à quel point « il est difficile pour le Rwanda de rester à l’abri, face aux crises qui secouent le Burundi et la RDC », souligne ainsi Thierry Vircoulon, chercheur à l’Institut français des relations internationales et spécialiste de la région des Grands Lacs.
« Le Rwanda croît que le Burundi peut servir de base arrière pour les éléments qui veulent le déstabiliser», estimait encore récemment une source militaire rwandaise, citée par The East African. Et Bujumbura retourne de son côté l’accusation à l’encontre de Kigali, l’accusant régulièrement d’héberger des mouvements rebelles qui ne rêvent que de renverser le régime de Pierre Nkurunziza.
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