Les Comoriens approuvent à 92,74 % un référendum qui renforce les pouvoirs du président Assoumani
Les Comoriens ont approuvé à 92,74 % le référendum destiné à renforcer les pouvoirs du président Azali Assoumani, a-t-on appris mardi 31 juillet de source officielle. Un scrutin boycotté par l’opposition, qui dénonce un « trucage ».
« Je vous donne les résultats au niveau national. Oui : 172 240, soit 92,74 %. Non : 13 338, soit 7,26 % », a déclaré mardi Ahmed Mohamed Djaza, le président de la commission, dans une conférence de presse à Moroni.
Quelques instants avant cette proclamation officielle, Mohamed Daoudou, le ministre de l’Intérieur, avait indiqué au journal d’État Al-Watwan que les premières tendances sorties des urnes montraient que le « oui » l’emportait « largement ».
Le taux de participation dans le petit archipel de l’océan Indien de moins de 800 000 habitants s’établit à 63 %, a ajouté le ministre, se félicitant que le scrutin se soit « déroulé dans de bonnes conditions ».
Les dispositions controversées
L’opposition, qui avait jugé le référendum « illégal », a immédiatement crié au « trucage ». « Quels résultats ! Un scrutin truqué, des chiffres préfabriqués, voilà la consultation populaire du président Azali », a réagi mardi Ahmed el-Barwane, le secrétaire général du parti Juwa.
Parmi les dispositions du texte les plus controversées : la possibilité que le président puisse briguer deux mandats de cinq ans consécutifs, contre un seul actuellement.
Outre cette disposition très controversée, le projet défendu par Azali Assoumani, ex-putschiste élu en 2016, supprime aussi les trois postes de vice-président et la Cour constitutionnelle, plus haute instance judiciaire du pays. Il fait également de l’islam la « religion d’État » du pays, à 99 % musulman.
Des anomalies dans le vote
L’opposition, qui a jugé le référendum « illégal », n’a pas fait campagne. Dans la capitale Moroni, seuls quelques rares portraits du président barrés d’un « oui » sont placardés.
Très peu de Comoriens avaient fait le déplacement lundi dans les bureaux de vote, avec souvent moins d’un quart de votants une heure avant leur fermeture. Un constat partagé par les observateurs de la Force en attente de la région Afrique de l’Est (EASF), qui ont constaté des anomalies suspectes.
« Dans la plupart des bureaux visités, il y avait moins de 20 électeurs qui attendaient. Mais quand on repassait une heure plus tard, on constatait soudain un afflux de bulletins dans l’urne », a déclaré Jules Hoareau de la mission de l’EASF. « Cela n’a pas de sens », a-t-il ajouté.
Ce dernier a par ailleurs dénoncé le fait que « dans tous les bureaux visités » par l’EASF, « les représentants des partis n’ont pas été autorisés à signer les procès-verbaux », ce qui met « en doute la crédibilité du processus électoral ».
« Abus de pouvoir » du président
Au-delà des suspicions de fraude, le scrutin s’est par ailleurs déroulé dans un climat tendu, alors que l’opposition dénonce les « abus de pouvoir » d’Azali Assoumani depuis des mois. Plusieurs opposants ont été arrêtés, dont l’ex-président Ahmed Abdallah Sambi, grand rival d’Azali Assoumani, assigné à résidence, et la Cour constitutionnelle a été suspendue.
En dépit du climat tendu, le scrutin s’est déroulé dans un calme relatif. Seul un incident grave a été signalé à Moroni, où des urnes ont été détruites dans deux bureaux de vote et un gendarme grièvement blessé.
Assoumani au pouvoir jusqu’en 2029 ?
Le président Azali Assoumani, dont le mandat expire en 2021, avait prévu des élections anticipées en 2019 si le « oui » venait à l’emporter. Sa réforme modifiera par ailleurs profondément le système de présidence tournante en vigueur depuis 2001, ayant permis de stabiliser les Comores.
Avant le référendum, la Constitution établissait de fait une présidence tous les cinq ans entre les trois îles formant l’Union des Comores (Grande-Comore, Mohéli et Anjouan). Au terme de son mandat de cinq ans, le président ne pouvait pas se représenter immédiatement. Il devait attendre que ce soit le tour de son île pour briguer de nouveau la fonction suprême.
Si le projet de révision avait été rejeté, Azali Assoumani, 59 ans et issu de la Grande-Comore, aurait donc dû quitter ses fonctions en 2021 au profit d’une personnalité issue de l’île d’Anjouan pour un nouveau mandat de cinq ans. Avec cette nouvelle Constitution, il pourrait, à condition de remporter les élections, rester au pouvoir jusqu’en 2029.
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