Journalistes russes assassinés en Centrafrique : RSF réclame une enquête « sérieuse »
Après l’assassinat de trois journalistes russes dans la nuit de lundi à mardi en Centrafrique, Reporters sans Frontières (RSF) a réclamé mercredi aux autorités centrafricaines et russes « une enquête sérieuse et approfondie » pour identifier les auteurs.
« Orhan Djemal, célèbre reporter de guerre indépendant, Kirill Radtchenko, cameraman, et Alexandre Rasstorgouïev, documentariste, ont été assassinés par un groupe d’hommes armés non-identifiés » alors qu’ils enquêtaient sur l’implication de mercenaires russes en Centrafrique pour Tsour, « un média d’investigation en ligne appartenant à Mikhaïl Khodorkovski, l’un des principaux opposants de Vladimir Poutine », indique RSF dans un communiqué.
#Centrafrique : Selon nos informations, les trois #journalistes se trouvaient sur le territoire pour enquêter sur la présence et le rôle de mercenaires appartenant à Wagner, une société militaire privée russe également connue pour ses activités en Syrie.https://t.co/Kg4UhS6huh
— RSF (@RSF_inter) August 1, 2018
« Les trois journalistes se trouvaient sur le territoire centrafricain depuis quelques jours pour enquêter sur la présence et le rôle de mercenaires appartenant à Wagner, une société militaire privée russe également connue pour ses activités en Syrie », poursuit l’ONG, rappelant par ailleurs que les assassins de Camille Lepage, photojournaliste française de 26 ans tuée le 12 mai 2014, n’ont toujours pas été identifiés.
Leur chauffeur porté disparu
Leurs corps « ont été retrouvés à 23 km de Sibut, ils ont été assassinés par des hommes armés non identifiés », a déclaré mardi une source judiciaire, précisant qu’ils auraient été tués à un barrage dressé sur une route. Les corps des trois hommes ont été déposés mardi matin à la base de la Mission de l’ONU pour la stabilisation de la Centrafrique (Minusca) de Sibut, selon cette source. Leur chauffeur est porté disparu. « Ils rentraient de Kaga Bandoro (nord) par la route », a précisé une source religieuse de Sibut.
La présence russe de plus en plus forte
C’est la première fois que l’assassinat de citoyens russes est rendu public en Centrafrique, où la présence de la Russie est de plus en plus marquée depuis plusieurs mois. Début 2018, Moscou a déployé des formateurs militaires à Bangui, livré des armes à l’armée nationale et assure la sécurité du président Faustin-Archange Touadéra avec une quarantaine d’éléments des forces spéciales russes. Le conseiller à la sécurité du Président est également de nationalité russe.
La Russie a également réussi à obtenir une exemption sur l’embargo sur les armes frappant le pays afin de livrer du matériel militaire au gouvernement centrafricain. En décembre 2017, Moscou a ainsi vendu un important stock d’armes, incluant des armes de poing, des fusils d’assaut, des mitrailleuses et des lance-roquettes à destination des Forces armées centrafricaines (FACA).
La Russie a également obtenu l’autorisation de l’ONU pour dispenser une formation militaire à deux bataillons – environ 1 300 hommes – des Forces armées centrafricaines. Officiellement, le programme russe vise à renforcer une armée en grande difficulté dans un pays où la majeure partie du territoire est contrôlée par des groupes armés.
Influence russe
Mais par cette mission, Moscou vise également à renforcer son influence dans un État stratégique, riche en ressources telles que les diamants, l’or, l’uranium et le bois. Fin mai, le président Touadéra avait rencontré son homologue russe Vladimir Poutine à Saint-Petersbourg. Il l’avait remercié pour l’aide de la Russie à un moment ou son pays vit une « situation humanitaire difficile » et « un processus de consolidation et de réconciliation du pays ».
« Nous serons heureux de réfléchir à différents moyens d’intensifier nos relations, en premier lieu et avant tout dans les sphères économique et humanitaire », avait alors affirmé le président Poutine.
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