Deux poids, deux mesures

Publié le 29 novembre 2004 Lecture : 2 minutes.

Ça y est, le Club de Paris a cédé à la pression des États-Unis en approuvant, le 21 novembre, la décision d’effacer 80 % de la dette irakienne, soit un « cadeau » de 31,1 milliards de dollars sur un total de 38,9 milliards. Le président George W. Bush demandait 95 %, la France, l’Allemagne, la Russie proposaient 50 % Le FMI, qui a approuvé
un programme d’aide à l’Irak, a coupé la poire en deux en avalisant un taux de 80 %. Même les 27 pays pauvres très endettés (PPTE) ne peuvent espérer bénéficier d’une telle faveur : le Club de Paris (qui regroupe les dix-neuf principaux pays créanciers du Tiers Monde, y compris la Russie) n’a accordé, de 1999 à ce jour, qu’un effacement de 13,1 milliards de dollars à tous les PPTE réunis. La dette de ces derniers dont l’essentiel a été contracté par d’anciens dictateurs serait-elle moins « odieuse(*) » que celle laissée par Saddam Hussein ?
Le Nigeria (avec un fardeau dette de 35 milliards de dollars) devra se débrouiller pour
rembourser l’intégralité de ses créances. À l’instar du Vietnam, qui, à partir de 1976, a dû rembourser la dette du Sud-Vietnam aux États-Unis. L’Allemagne n’avait bénéficié d’un
allégement de la dette hitlérienne qu’en 1953, sept ans après le lancement du Plan Marshall. Seuls pays à avoir reçu un traitement de faveur : l’Indonésie (en 1970 après la mort de Sukarno), la Pologne (en 1991 après l’effondrement du bloc communiste) et l’Égypte
(en 1991, après la première guerre du Golfe). Mais jamais un État n’avait reçu un cadeau d’une telle ampleur, le « principe de continuité » valant pour la dette extérieure, comme pour tous les autres engagements de l’État souverain. C’est en vertu de ce principe que le Nigeria et les autres PPTE devront payer la totalité ou la quasi-totalité de leurs créances, même si les intérêts qu’ils ont déjà versés dépassent le montant de la dette principale.
En outre, le Club de Paris demande pour ne pas dire exige des autres bailleurs de fonds d’effacer également 80 % de leurs créances sur l’Irak, en abandonnant 65 milliards de dollars sur 81,3 milliards, dont les deux tiers à la charge des pays du Golfe. Ces derniers, faut-il le rappeler, avaient refusé, en 1990, d’annuler les dettes contractées par Saddam pour financer sa guerre contre l’Iran, provoquant ainsi l’invasion du Koweït, la première et la seconde guerre du Golfe et la mainmise des États-Unis sur l’Irak.

* Une dette est dite odieuse quand elle est contractée par un régime dictatorial.

la suite après cette publicité

La Matinale.

Chaque matin, recevez les 10 informations clés de l’actualité africaine.

Image

Contenus partenaires