Regards sur Israël

Publié le 29 septembre 2003 Lecture : 2 minutes.

Sur le grand écran, les critiques les plus virulentes contre l’État juif sont souvent venues de cinéastes israéliens. Et parmi ces derniers, le plus talentueux, à n’en pas douter, se nomme Amos Gitai. Depuis plus d’un quart de siècle, il s’est imposé comme le plus important réalisateur de son pays, d’abord comme un documentariste incisif, puis, de façon éclatante, comme auteur de fictions consacrées à des sujets « qui fâchent ». On se souvient de Kadosh (charge sans concession sur l’intégrisme religieux chez les Juifs), de Kippour (vision peu conventionnelle de l’armée israélienne et de ses « exploits ») ou de Kedma (film historique sans fard sur les affrontements en Palestine en 1948).
Avec Alila, c’est sur un ton plus léger qu’Amos Gitai poursuit sa description des travers de la société israélienne en suivant les trajectoires d’individus emblématiques vivant autour de la cour d’un immeuble situé à la limite entre Tel-Aviv et Jaffa. La cohabitation est difficile entre ces personnages hauts en couleur : le vieux gardien ashkénaze râleur entend imposer un règlement dont personne ne veut, les Juifs marocains fraîchement immigrés ont entrepris une extension sauvage de leur logement, le militaire un tantinet paranoïaque joue les espions pour impressionner sa maîtresse secrète mais peu discrète dans la chambre sous-louée abritant leurs amours très particulières, la bonne philippine observe tout et fait mine de ne rien comprendre, les Chinois travaillent au noir pour des salaires de misère afin de remplacer la main-d’oeuvre palestinienne prisonnière des Territoires occupés, le mari « répudié » ne supporte ni sa solitude ni l’idée de voir son fils tenter d’échapper à l’armée, etc.
Cette chronique adaptée d’un roman de Yehoshua Knaz, est une sorte de remake d’un La Vie, mode d’emploi (roman de Georges Perec) version moyen-orientale. Le film se voit sans déplaisir grâce au sens de l’observation du réalisateur, qui croque avec bonheur les petits riens de l’existence et les émotions éphémères qui en disent plus sur une société que toutes les études savantes. Néanmoins, Gitai est plus à l’aise quand il aborde des sujets « sérieux » avec sensibilité et humour que lorsqu’il tente de s’improviser auteur de comédie.
Avec Avi Mograbi, auteur-réalisateur-acteur d’Août, avant l’explosion, on ne risque guère de se demander s’il doit opter pour le drame ou la comédie. Ce trublion emprunte autant à Michael Moore, pour le narcissisme et l’humour pamphlétaire, qu’aux grands acteurs burlesques, pour sa capacité à construire un film à base de mimiques et de facéties. Résultat, une ribambelle de sketchs désopilants et déroutants qui constituent un film documentaire original et subjectif diablement efficace pour décrire le désarroi des Israéliens « libéraux » et humanistes à l’époque de Sharon et de la seconde Intifada.

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