Du sud vers le nord

Historiquement présente dans l’océan Indien et en Afrique du Sud, la diaspora chinoise – la plus importante du monde – étend son influence.

Publié le 29 août 2005 Lecture : 4 minutes.

«L es Chinois sont partout… » L’antienne, maintes fois ressassée en Afrique et ailleurs, n’en revêt pas moins une grande justesse. Près de 100 millions de sujets – sur une population de 1,3 milliard – vivent hors de Chine, ce qui constitue la diaspora la plus importante du monde. Cinq cent mille d’entre eux – Taiwanais et Hongkongais inclus – ont choisi de se fixer sur le continent. Le succès des communautés chinoises en Afrique tient principalement à leur ardeur au travail. Malgré l’éloignement, toutes ont su conserver leur culture, leur système de valeurs et des liens puissants avec leur pays d’origine, ravivés lors des vagues d’immigration successives et par le développement des échanges commerciaux.

Afrique du Sud. La communauté chinoise en Afrique du Sud est estimée à 300 000 personnes. Des archives relatent l’arrivée d’immigrants chinois dès 1650, peu après l’établissement des Hollandais dans la région du cap de Bonne-Espérance. Plusieurs vagues se sont ensuite succédé, notamment sous la domination anglaise, sur le territoire qui allait devenir l’Afrique du Sud. Le Royaume-Uni fit venir de nombreux travailleurs chinois dans les mines d’or du Transvaal. Bien qu’un grand nombre d’entre eux aient été rapatriés après 1910, certaines communautés se sont établies à travers le pays, surtout autour de Johannesburg et de Port Elizabeth.
La minorité chinoise a souffert dès le XVIIe siècle d’un mauvais accueil et d’une mauvaise perception dans la société sud-africaine. Selon Melanie Yap et Dianne Leong Man, auteur d’un livre traitant de la minorité chinoise en Afrique du Sud (Colour, Confusion and Concessions, Hong Kong University Press, 1996), les Chinois, n’ayant la peau ni assez foncée pour être Noirs ni assez claire pour être Blancs, ont dû se faire discrets, et vivre et prospérer dans l’adversité. À la fin du XIXe siècle, les journaux critiquaient avec virulence les communautés asiatiques, tenant ouvertement des propos racistes à leur égard. En 1897, le gouvernement fit passer certaines lois pour limiter l’essor de l’immigration et du commerce chinois dans la région. La chute du régime d’apartheid a toutefois mis fin à la discrimination dont souffraient ces communautés et, en avril 2004, la première députée d’origine chinoise a été élue au Parlement sud-africain. Sherry Su-Hei Chen est arrivée de Taiwan en 1981 et a réussi à se faire admettre progressivement dans la société sud-africaine tandis que son mari faisait des affaires dans le textile. La famille est aujourd’hui un symbole de réussite pour une communauté très solidaire et qui, si elle parvient à prospérer, reste un peu en marge.

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Madagascar. « À Madagascar, l’administration coloniale française a fortement réglementé et limité les activités économiques des populations étrangères, dont celles des Chinois, très implantés dans le commerce et dispersés sur toute l’île », explique le chercheur français Pierre Picquart, auteur de L’Empire chinois, Mieux comprendre le futur numéro un mondial (éd. Favre). Constituée de travailleurs agricoles, la communauté a été rejointe, dans la seconde moitié du XXe siècle, par des Chinois de la Réunion et de l’île Maurice. Elle compte aujourd’hui quelque 15 000 individus dont une majorité de Cantonais. Avec le déclin de l’économie rurale, elle a implanté et développé ses activités dans les villes : import-export, petit commerce, restauration, hôtellerie, transports de marchandises, boulangeries, usines de boissons… La Grande île compte environ deux mille entreprises chinoises. Elles se développent dans le cadre des zones de libre-échange avec les autres îles des Mascareignes.

Maurice. « La présence des marchands chinois date du XVIIIe siècle dans une île à vocation sucrière, mais les premiers migrants étaient des ouvriers agricoles recrutés sous contrat », indique Pierre Picquart. On compte actuellement plus de 30 000 Mauriciens d’origine chinoise, soit 2,9 % de la population de l’île. Plusieurs d’entre eux occupent des postes de responsabilité, tels ces trois juges – sur neuf – qui siègent à la Cour suprême, la plus haute juridiction du pays. La diaspora est très active dans l’industrie textile. Dans le quartier chinois de Port-Louis, les plus vieux habitants de la communauté portent toujours l’habit traditionnel et pratiquent un dialecte souvent incompréhensible.

Île de la Réunion. Sur les 615 000 habitants de la Réunion, les Chinois sont estimés à 15 000. Les premiers sont arrivés en 1844 et ont travaillé sous contrat à la construction des routes, des digues et pour les travaux agricoles. Plusieurs s’installeront ensuite dans le commerce. Aujourd’hui, ils dominent les réseaux de distribution et exercent majoritairement des professions libérales.

Afrique de l’Ouest et centrale. Les pays d’Afrique de l’Ouest et centrale comptent de petites communautés chinoises qui se sont installées dans la deuxième moitié du XXe siècle, avec l’essor de la coopération sino-africaine. Très généralement, il s’agit de coopérants ou d’employés d’entreprises chinoises qui ont choisi de rester là pour développer une activité commerciale (restauration, petit commerce, etc.). Depuis 2000, ces derniers constituent des relais pour l’accueil les nombreux commerçants chinois qui viennent s’implanter dans les grandes métropoles africaines. On trouve des communautés chinoises – de quelques centaines à plusieurs milliers de personnes – en Guinée, au Sénégal, en Gambie, au Mali, au Cameroun, au Congo, au Gabon, au Nigeria…

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Maghreb. Le Maghreb compte un grand nombre de coopérants techniques et salariés d’entreprises chinoises, particulièrement dans le bâtiment, les travaux publics et le textile. On dénombre un peu plus de 1 000 Chinois au Maroc, dont 500 pêcheurs à Agadir, 150 à 200 hommes d’affaires à Casablanca et une centaine de médecins dans tout le royaume. L’Algérie accueille de plus en plus de citoyens de la république populaire – entre 1 000 et 2 000 selon les estimations – dont la majorité travaille dans la construction. La Mauritanie emploie également de très nombreux médecins et infirmières chinois.

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