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Publié le 29 mai 2006 Lecture : 2 minutes.

Médecins, ingénieurs ou enseignants, l’Afrique se vide dangereusement de ses personnels qualifiés. Chaque année, ce sont près de 74 000 diplômés qui quittent le continent, selon une étude de la Banque mondiale publiée en octobre 2005, soit le tiers de l’émigration totale. Trois pays, qui mènent une politique d’entrée sélective, concentrent la moitié de ces migrants haut de gamme : États-Unis (32 %), Australie (12 %) et Canada (6 %). L’Europe des Quinze en accueille 46 %. Au total, entre les années 1990 et 2000, le nombre d’expatriés africains diplômés a augmenté de 113 % dans les trente pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), pour s’établir à 1,4 million. « La horde de miséreux » frappant aux frontières du Nord, au péril de leur vie, n’est donc qu’un aspect partiel d’un phénomène qui touche toutes les couches sociales. Aux États-Unis, 70 % des résidents d’origine africaine sont qualifiés. Au sein de l’Union européenne, la moyenne relativement faible (19 %) cache de fortes disparités : 42 % au Royaume-Uni et 15 % en France, laquelle, historiquement, est allée chercher de la main-d’uvre dans ses ex-colonies. Les nations africaines anglophones sont donc les principales « pourvoyeuses ». Sur l’ensemble de la zone subsaharienne, les travailleurs qualifiés constituent 4 % de la population active et 40 % des candidats à l’exode.
« La fuite des cerveaux va s’amplifier », pronostique l’un des auteurs de l’étude, Abdeslam Marfouk. À cela plusieurs raisons : le vieillissement de la population active dans les pays développés, conjugué à une pénurie d’employés qualifiés dans certains secteurs d’activité, et la généralisation des mécanismes de sélection, en France notamment. Cette perte de capital humain n’est pas sans conséquence. La formation des élites devient un investissement non amorti, et ces départs creusent le fossé du développement. Quelques exemples : il y a plus de médecins originaires du Malawi dans la ville anglaise de Manchester que dans tout le Malawi. La France compte 329 médecins pour 100 000 habitants, contre 6 au Bénin.
Seule compensation, l’argent des migrants. Selon la Banque mondiale, les transferts de fonds en direction des pays du Sud ont atteint, en 2005, 167 milliards de dollars, soit plus du double de l’aide au développement. Un montant qu’il convient de gonfler de 50 % si on prend en compte les mouvements informels. Se référant à ces chiffres et à une enquête dans plusieurs pays du continent, le vice-président de l’institution internationale, François Bourguignon, estime que l’émigration est « un puissant outil de réduction de la pauvreté ». De fait, le revenu par habitant a augmenté ces dernières années alors qu’il diminuait durant les années 1980-1990. Mais pour faire fructifier et valoriser cette manne, l’Afrique doit pouvoir compter sur ses bras et ses têtes.

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