Pascal Boniface

Directeur de l’Institut de relations internationales et stratégiques (Iris), enseignant à l’Institut d’études européennes de l’université Paris-VIII.

Publié le 29 mai 2006 Lecture : 2 minutes.

Jeune Afrique : Dans Foot et mondialisation*, vous livrez une étude géostratégique du football. Un sport plus « politique » qu’un autre ?
Pascal Boniface : Parce qu’il est le plus populaire ! Cette année encore, deux à trois milliards de personnes devraient suivre la finale du Mondial. Il n’y a pas deux ou trois milliards d’individus pour une finale de rugby, de handball ou de basket-ball.
Que représente une qualification pour les pays africains qui n’ont jamais participé à la phase finale d’une Coupe du monde ?
C’est d’abord une fierté. Participer à cette compétition, c’est intégrer un club de privilégiés, où il est difficile d’entrer. C’est ensuite une lourde responsabilité, car ces pays vont devoir faire au moins aussi bien que leurs prédécesseurs, mieux que participer honorablement au premier tour. Depuis les exploits des Camerounais et des Nigérians [respectivement quarts de finaliste en 1990 et huitièmes de finaliste en 1994 et 1998, NDLR], il y a une sorte d’obligation, pour les formations du continent, à aller le plus loin possible dans la compétition.
L’Afrique tient une place particulière à ce Mondial. Elle n’a jamais atteint les demi-finales et elle n’a pas d’entraîneurs africains, Angola mis à part Est-ce une transposition de la domination du « Nord » sur le « Sud » ?
Je préfère dire que la « planète football » n’est pas encore multipolaire. Elle reste un condominium européen et latino-américain, que l’Asie et l’Afrique tentent de contester. Rappelons que ce n’est qu’en 2002 que la Corée du Sud a atteint les demi-finales. Quant à la nationalité des sélectionneurs, elle relève d’un choix des dirigeants de clubs. C’est à eux d’expliquer pourquoi ils font plus confiance aux entraîneurs étrangers.
Vous écrivez que le football peut être le facteur d’éclatement ou le ciment d’une nation. Qu’en est-il en Afrique ?
À l’exemple de ce qui se passe en Côte d’Ivoire, il est plutôt un ciment. Dans la plupart des pays africains, l’équipe nationale est un fort marqueur identitaire. Pour les populations, elle est beaucoup plus proche d’eux que leur ambassade à l’ONU, par exemple.
En 2010, l’Afrique accueillera la première Coupe du monde de son histoire. Quel sens prendra un tel événement ?
Il s’agit d’abord d’une normalisation, puisque l’Afrique reste, à ce jour, la seule région du monde à n’avoir jamais organisé la compétition. Elle va enfin pouvoir montrer qu’elle est capable d’être au rendez-vous sur le plan logistique. Les pays du continent se verront reconnaître un statut de membre de la communauté internationale mondialisée à part entière.

* Foot et mondialisation, Armand Colin, 176 pages, 18 euros.

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