Maroc : les désespérés du boulevard Mohammed-V

Publié le 29 mai 2006 Lecture : 2 minutes.

« La fonction publique ou la mort ! » Tel est, depuis peu, le slogan le plus volontiers scandé par les diplômés-chômeurs qui se réunissent presque quotidiennement boulevard Mohammed-V, devant le siège du Parlement, à Rabat. Pour manifester leur colère contre un système qui produit des chômeurs en série. Les promesses non tenues de l’ancien gouvernement d’Abderrahmane Youssoufi et les engagements qui tardent à se concrétiser de l’actuel, dirigé depuis 2003 par Driss Jettou, ont favorisé la radicalisation de ce mouvement né en décembre 1991, dans le sillage des émeutes de Fès.
Pour faire entendre leurs revendications, les diplômés-chômeurs marocains ne reculent plus devant les actions les plus désespérées. Le 15 décembre 2005, six d’entre eux ont tenté de s’immoler par le feu devant le siège du ministère de la Santé. Le 2 mars dernier, nouvelles tentatives de suicide dans le Mellah, le quartier juif de Rabat, où quatorze chômeurs aspergent leurs vêtements d’essence avant d’y mettre le feu. Ce qu’ils réclament : l’égalité des chances en matière d’accès à l’emploi, une meilleure adéquation formation-emploi et, surtout, le droit au travail dans le secteur public.
Une large majorité d’entre eux refusent en effet la précarité de l’emploi dans le privé. La loi de finances 2006 prévoit la création dans la fonction publique de 12 000 postes budgétaires, au lieu des 7 000 habituellement programmés, mais c’est une goutte d’eau dans la mer. Le nombre des diplômés-chômeurs est aujourd’hui évalué à 120 000, dont 100 000 inscrits à l’Agence nationale de la promotion de l’emploi et des compétences (Anapec).
Au Maroc, l’obtention d’un diplôme n’est en aucun cas une assurance contre le chômage. C’est même peut-être l’inverse. Selon les statistiques du Haut-Commissariat au plan (HCP) pour le quatrième trimestre 2005, en zone urbaine, le taux de chômage des titulaires d’un diplôme (27,6 %) est presque trois fois supérieur à celui des demandeurs d’emploi qui en sont dépourvus (9,7 %). Au plan national, près d’un chômeur sur quatre (24,3 %) possède un diplôme universitaire. À l’inverse, les personnes sans diplôme sont deux fois moins touchées par le chômage (5 %) que la moyenne nationale.
Les diplômés-chômeurs se sont regroupés au sein de collectifs tels que l’Association nationale des diplômés-chômeurs au Maroc (ANDCM). Et sur le boulevard Mohammed-V, à Rabat, devenu leur quartier général, ils s’efforcent de maintenir la pression.

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