Pascal Affi N’Guessan : « L’alliance FPI-PDCI, c’est un vieux souhait qui va bientôt se réaliser »
Après la rupture du PDCI avec le RDR, le président du parti pro-Gbagbo annonce sa nouvelle alliance avec Henri Konan Bédié et des listes communes lors des prochaines élections locales.
Jeudi 9 août, après treize ans de compagnonnage, Henri Konan Bédié a officiellement rompu avec le parti du chef de l’État Alassane Ouattara. Dès le lendemain, tout sourire, il recevait Pascal Affi N’Guessan, le président de la branche officielle du principal parti d’opposition pour discuter d’une nouvelle alliance avec le Front populaire ivoirien (FPI).
Après des années de face-à-face, les deux hommes marchent-ils désormais main dans la main ? À la tête d’un parti divisé, en lutte contre de nombreuses figures pro-Gbagbo, dont Simone Gbagbo, libérée le 8 août, Affi N’Guessan assure que la recomposition du paysage politique ivoirien est en marche. Et espère bien en profiter dès les prochaines élections municipales et régionales, prévues le 13 octobre.
Jeune Afrique : Vendredi 10 août, vous êtes allé voir Henri Konan Bédié. Que vous êtes-vous dit ?
Pascal Affi N’Guessan : Ensemble, nous avons noté sa rupture avec le parti présidentiel du Rassemblement des Républicains (RDR) et sa décision de ne plus s’associer au processus de parti unifié. C’est une bonne nouvelle car cette rupture met fin à une période difficile. Sous la houlette du président Alassane Ouattara, le Rassemblement des Houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RHDP) [qui était composé du RDR et du PDCI], a échoué à réconcilier le pays, à promouvoir la bonne gouvernance, à lutter contre la corruption et la pauvreté. L’échec est patent.
Nous ne sommes plus au stade des spéculations ! Nous sommes en train de discuter de la forme de cette nouvelle alliance
Il était donc important qu’une alternative se construise et cela n’était pas possible sans le PDCI. Désormais, nous sommes en pleine recomposition du paysage politique. Il va être possible de constituer une nouvelle majorité très prochainement. Henri Konan Bédié a dit qu’il souhaitait créer une plateforme avec toutes les forces politiques qui le souhaitent. Cette visite était donc l’occasion de marquer notre disponibilité.
Lorsque vous lui avez dit être disponible pour une alliance, que vous a répondu Henri Konan Bédié ?
Nous ne sommes plus au stade des spéculations ! Nous sommes en train de discuter de la forme de cette nouvelle alliance. Dans les semaines à venir, cette plateforme va voir le jour, regroupant toutes les forces politiques désireuses de construire une nouvelle alternative.
Il est donc acté que vous en ferez partie…
Oui ! Je le dis depuis plusieurs années : en Côte d’Ivoire, il y a déjà eu deux alliances, FPI-RDR et RDR-PDCI. Il reste donc une dernière alliance, FPI-PDCI, pour que la boucle soit bouclée et je crois que le moment est arrivé. C’est un vieux souhait qui va bientôt se réaliser.
Ce n’est pas du tout retourner sa veste, c’est être toujours au service du pays
Mais depuis 2011, vous n’avez eu de cesse de conspuer le PDCI, qui était au pouvoir avec le RDR. Que répondez-vous à ceux qui disent que vous êtes une girouette ?
Mais non, c’est ça la politique ! Chaque époque a ses réalités, rien n’est figé. L’important, ce sont les intérêts du pays.
Vous ne retournez pas votre veste ?
Ce n’est pas du tout retourner sa veste, c’est être toujours au service du pays.
Des élections locales sont prévues pour le 13 octobre prochain. Souhaitez-vous former des listes communes avec le PDCI ?
Oui, des listes communes sont déjà en négociation pour les municipales comme pour les régionales. Nos deux partis ont publiquement marqué leur proximité et leur volonté de constituer une plateforme commune, donc les états-majors et les responsables locaux sont en mouvement.
Dans les zones où le PDCI est dominant, ces listes communes seront sous la bannière PDCI et elles seront sous la bannière FPI dans nos bastions. Au cours de notre entretien, le président Henri Konan Bédié lui-même a marqué son accord de principe pour cette alliance électorale.
Avec cette recomposition politique, ces élections seront l’occasion de jauger chacun des partis. Quelles sont vos ambitions pour les locales ?
Notre ambition est d’abord de revenir dans les collectivités locales, puisque nous en sommes exclus depuis la crise de 2010-2011 [le FPI a boycotté les municipales et régionales de 2013]. Il faut donc reprendre pied au plan local. Jusqu’où ? Tout dépend de l’adversité, et des moyens. Aujourd’hui, nos moyens sont très modestes mais nous essaierons de faire le maximum.
Si [Simone Gbagbo] ne veut pas nous voir, on le saura.
Seriez-vous favorable à ce que Guillaume Soro intègre également votre nouvelle alliance ?
Tous ceux qui partagent la même vision de l’avenir de la Côte d’Ivoire sont les bienvenus. Guillaume Soro est pour l’instant vice-président du RDR. S’il sort de son parti et qu’il veut nous rejoindre, nous n’avons pas de raison de l’exclure.
Vous êtes allé voir Henri Konan Bédié mais, en revanche, vous n’êtes pas allé saluer Simone Gbagbo, l’ancienne Première dame, qui a été libérée le 8 août dernier après sept ans de détention. Pourquoi ?
Ce n’est pas de notre fait. Nous avons pris contact avec son protocole pour venir la saluer, et il nous a été demandé de patienter. Nous attendons donc leur retour. Je crois qu’à l’heure actuelle, Simone Gbagbo a pris une retraite pour se reposer. Dès qu’elle va revenir, le protocole nous fera signe.
L’ancienne Première dame a reçu plusieurs personnalités politiques. Ne veut-elle pas simplement ne pas vous voir?
Si elle ne veut pas nous voir, on le saura.
Dès sa sortie de prison, elle s’est affichée aux côtés d’Abdouramane Sangaré qui conduit l’aile dissidente du FPI. Cela ne met-il pas en cause la légitimité de votre propre branche ?
La légitimité ne découle pas de l’opinion d’un leader politique, elle se construit sur le terrain. Je suis député à l’Assemblée nationale, donc j’ai été élu, je suis à la tête d’un parti. Nous avons organisé deux grandes manifestations, la fête de la liberté et le congrès, qui ont montré notre ancrage sur le terrain. Donc nous n’avons aucun complexe et aucun problème de légitimité.
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