Côte d’Ivoire : quelle réforme pour la Commission électorale indépendante ?

L’annonce du président Alassane Ouattara sur une éventuelle recomposition de la Commission électorale indépendante (CEI) a ravivé les tensions déjà fortes autour de cette instance. Alors que l’opposition continue de réclamer sa réforme, celle-ci a annoncé l’ouverture du dépôt des candidatures aux élections locales du 13 octobre 2018.

Youssouf Bakayoko, président de la Commission électorale indépendante ivoirienne, le 25 octobre 2016. © Capture d’écran YouTube/ CEI

Youssouf Bakayoko, président de la Commission électorale indépendante ivoirienne, le 25 octobre 2016. © Capture d’écran YouTube/ CEI

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Publié le 17 août 2018 Lecture : 3 minutes.

Les candidats aux élections municipales et régionales ont jusqu’au 29 août pour déposer leurs dossiers à la Commission électorale indépendante (CEI), selon un communiqué de l’institution qui fixe le début des inscriptions au 14 août, soit un peu plus d’une semaine après l’annonce faite par le président Alassane Ouattara, dans son adresse à la nation du 6 août, veille de la célébration des 58 ans d’indépendance de la Côte d’Ivoire.

Le chef de l’État a alors annoncé avoir « instruit le gouvernement à l’effet de réexaminer la composition de la Commission électorale indépendante ». En insistant que le fait qu’il souhaitait que « les prochaines élections soient inclusives et sans violence », le président laissait à penser que cette recomposition devrait intervenir avant les élections locales.

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Quiproquo

Aussi, Pascal Affi N’Guessan, président du Front populaire ivoirien (FPI, parti de Laurent Gbagbo) s’est-il empressé d’inviter le gouvernement à reporter les élections, pour « mettre en œuvre les réformes annoncées avec la participation de tous les acteurs politiques civils et institutionnels, pour garantir des élections justes et transparentes ».

Manifestement, « il y a eu un quiproquo, explique un proche de Ouattara. Le président de la République parle de recomposition de la CEI. En une semaine, la question peut être réglée, il n’y a donc pas nécessité de reporter les élections. L’opposition, quant à elle, parle de réforme. Certains vont jusqu’à réclamer le chamboulement de tout le processus électoral… Cela ne saurait se faire. »

La question de la réforme de la CEI est au cœur de revendications portées par une partie de l’opposition, qui trouve un écho au sein de la société civile. Si l’on sait que les négociations entre pouvoir et opposition sur cette question doivent s’ouvrir dans la première quinzaine de septembre, on ignore encore le visage que va prendre la structure organisatrice des élections.

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Le départ de Youssouf Bakayoko cristallise les crispations. À 75 ans, en poste depuis huit ans et dont le mandat légal a expiré depuis février 2016. Visage de la crise post-électorale de décembre 2010 à avril 2011 – avec l’ancien président du Conseil constitutionnel, Paul Yao N’Dré -, Bakayoko s’est jusque-là accroché à son fauteuil en dépit de nombreux appels à démissionner. Une figure moins politiquement marquée devrait donc occuper son fauteuil.

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À l’initiative de la plainte contre l’État de Côte d’Ivoire pour « déséquilibre de la CEI » qui a valu à la Côte d’Ivoire l’injonction par la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples (CADHP) de recomposer sa commission électorale, le militant des droits de l’homme Eric-Aimé Sémien plaide pour que « la gestion de la CEI relève exclusivement des organisations de la société civile ». Selon lui, « un processus démocratique pourra par la suite conduire à la désignation des personnes devant composer la Commission ».

D’autres acteurs de la société civile, qui pointent le silence de certaines organisations représentées au bureau de la CEI, préfèrent que celle-ci soit dirigée par un expert sélectionné à la suite d’un appel à candidatures.

Commission déséquilibrée

Quant à la composition de la CEI,  elle pourrait vite évoluer. Le bureau central de la CEI compte dix-sept membres. Quatre membres sont issus de la mouvance présidentielle, quatre de l’opposition, quatre de la société civile et cinq au titre des institutions de la République, notamment la présidence.

Ce sont ces cinq derniers membres qui faussent le jeu d’équilibre au sein du bureau, étant les mandants de membres de l’exécutif qui, eux-mêmes, sont issus de la mouvance présidentielle. Il est donc possible que ces derniers n’aient plus voix délibérative, qu’ils deviennent de simples observateurs, à défaut de ne plus faire partie du bureau.

Pour Aboudramane Sangaré, président intérimaire de la dissidence du FPI (la tendance qui a désigné récemment Laurent Gbagbo comme son président), la recomposition de la CEI est certes « une des questions majeures en matière d’élections justes et transparentes », mais « l’opposition politique responsable et le FPI ont toujours considéré comme indissociables, les questions de l’équité du découpage électoral, de la fiabilité du fichier électoral, de l’accès de tous les partis politiques aux médias d’État, de la sécurisation de l’environnement électoral ».

Sur ce point, l’opposition est en phase avec le Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI) d’Henri Konan Bédié, qui a récemment suspendu son alliance avec la mouvance présidentielle.

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