Liban – Wadih Al-Asmar : « Le gouvernement syrien freine le retour des réfugiés »

Wadih Al-Asmar, le président du Centre libanais des droits de l’homme et du réseau EuroMed Rights, se montre sceptique sur le plan d’aide russe en faveur du Liban, pour le retour des réfugiés syriens.

Des réfugiés syriens se rassemblant dans leur véhicule au Liban, en juin 2018. © Bilal Hussein/AP/SIPA

Des réfugiés syriens se rassemblant dans leur véhicule au Liban, en juin 2018. © Bilal Hussein/AP/SIPA

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Publié le 21 août 2018 Lecture : 2 minutes.

La Russie va aider le Liban à mettre en œuvre le retour des réfugiés syriens. C’est ce qu’a annoncé le 20 août le ministre des Affaires étrangères russe Sergueï Lavrov à son homologue libanais Gebran Bassil, beau-fils du président Michel Aoun et leader du Courant patriotique libre (CPL). « Nous avons évoqué l’ouverture de contacts directs entre les ministères des Affaires étrangères des deux pays afin de mettre en application l’initiative russe », a notamment déclaré Gebran Bassil à l’issue de l’entretien.

Les experts estiment à près d’1,5 million le nombre de réfugiés syriens au Liban, dont 20 % seulement seraient réunis dans des camps souvent informels. Une pression démographique et économique difficile à soutenir pour ce pays d’un peu plus de 4 millions d’habitants.

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Contre le retour des réfugiés ?

Si le plan détaillé de l’initiative russe pour le retour des réfugiés syriens reste confidentiel, il semble que le gouvernement libanais ait décidé de discuter du sujet directement avec Moscou. « Le gouvernement syrien n’est plus un acteur majeur, la solution à la crise syrienne se négocie entre Washington et Moscou. Il faut donc discuter avec les Russes, d’autant que le gouvernement syrien freine le retour des réfugiés », analyse Wadih Al-Asmar, président du Centre libanais des droits de l’homme (CLDH).

Contacté par JA, ce dernier dénonce aussi l’instrumentalisation de la problématique migratoire par certains acteurs politiques libanais, dont le CPL du ministre Gebran Bassil : « Ils ont tenu un discours très anti-réfugiés tout en bloquant la reconnaissance du statut de réfugié. Ils ont ainsi privé ces derniers d’une protection structurée et formelle au Liban, tout en empêchant le pays de recevoir un nombre important d’aides internationales à cause de ce discours, parfois à la limite du racisme. Si vous répétez depuis cinq ans que vous voulez renvoyer les réfugiés chez eux, ou que ce sont des travailleurs saisonniers, comment voulez-vous obtenir des aides pour leur accueil ? »

Par ailleurs, le nombre de réfugiés serait régulièrement gonflé par les mêmes acteurs politiques pour des raisons électoralistes, selon Wadih Al-Asmar.

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Des garanties jugées insuffisantes

Les réfugiés manqueraient également de garanties suffisantes sur leur sécurité une fois de retour en Syrie. Dans ces conditions, la déclaration de Gebran Bassil – « Le Liban est en faveur d’un retour rapide (…) et non lié à une solution politique du conflit en Syrie » – inquiète l’organisation des droits de l’homme. « Ce n’est pas l’intérêt du Liban. Si le plan n’offre pas ces garanties, les réfugiés ne seront pas convaincus de rentrer. C’est donc contre-productif. D’ailleurs la majorité des réfugiés déclarent vouloir partir en Europe. Ils ont perdu espoir de rentrer en Syrie et savent qu’ils ne peuvent pas construire leur avenir au Liban », déclare Wadih Al-Asmar.

Selon lui, seuls 1500 réfugiés seraient rentrés depuis 3 mois. L’année dernière, une source de sécurité libanaise avait affirmé à l’AFP qu’entre 250 et 300 Syriens seulement avaient quitté le Liban en vertu d’un accord entre le Hezbollah et les rebelles.

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Wadih Al-Asmar appelle la communauté internationale à se saisir du plan russe pour lui insuffler des garanties de droit afin que les réfugiés ne soient pas poursuivis à leur retour.

La crise syrienne débutée en 2011 a fait près de 500 000 morts et poussé plus de 5 millions de Syriens à quitter leur pays.

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